jeudi 15 janvier 2015

Blasphème... Incompatible avec le concept de laïcité.

Là où il n'y a pas de croyance, il n'y a pas de blasphème.
Salman Rushdie




Depuis la semaine dernière un terme s’est répandu de façon regrettable et est en voie d’être honteusement banalisé, blasphème, banalisation qu’il convient d’enrayer sans tarder. Ce nom commun, qui, en fait, ne l’est guère, apparaît, selon le dictionnaire étymologique Bloch& Wartburg, au XIIème siècle dans le latin écclésiastique, blasphemia, avec le sens de parole impie, parole qui outrage la divinité, la religion, voilà bien là un premier détournement sémantique de taille, puisque le sens initial issu du grec blasphêmein apparaît dans le dictionnaire latin-français Gaffiot avec le sens général et non connoté de parole outrageante, calomnie. 



Blasphème est donc issu d’une période où le dogme régnait en maître, où la vérité était imposée aux plus faibles par les plus forts, aux plus pauvres par les plus riches, aux non-instruits par les détenteurs du savoir, et quiconque la contestait ou la refusait cette vérité imposée était considéré comme une menace à l’ordre établi, « le blasphème étant un péché, un crime contre Dieu » (le Grand Robert). Le mot blasphème est le fruit du dogme, c’est-à-dire « un point de doctrine établi comme une vérité incontestable dans une religion ». L’utilisation de ce mot est incompatible avec le concept de laïcité. Dans une République laïque, chacun peut, dans le cadre de sa sphère privée, croire en un dieu ou n’y pas croire, pratiquer ou non une religion, mais personne n’a le droit, selon ses choix religieux ou philosophiques, de décider ce que son voisin doit faire ou ne pas faire. C’est le chemin du fascisme et de la barbarie. Et les apprentis-sorciers de certains media qui banalisent ce terme d’un autre âge devraient réfléchir, réfléchir un bien grand mot bien sûr, car, quelle sera la prochaine étape ? L’apparition du mot péché dans le vocabulaire journalistique ?…

En leur nom 

mardi 13 janvier 2015

Laïcité : ne plus rien céder !



Laïcité : ne plus rien céder !

PÉRICO LÉGASSE
Liberté, égalité, fraternité et laïcité. Il faudra ajouter cette quatrième dimension au fronton des valeurs de la République en refusant toute concession à ceux qui, voulant assimiler cette clé du vivre ensemble à un intégrisme, font le jeux des xénophobes et arment le bras du terrorisme islamique. Tel est le pire des amalgames, cessons de nous cacher la face.

La messe est dite. Près de quatre millions d’habitants de ce pays, citoyens ou résidents, sont sortis dans la rue pour condamner l’assassinat de 17 innocents par le terrorisme islamique. Ça, c’est le factuel, le reste est hypothèse. On pourra disserter à l’infini sur les motivations finales des uns et des autres, le mot d’ordre général, repris dans toute la France ce dimanche 11 janvier 2015, restera à tout jamais : « Je suis Charlie ! » C’est-à-dire je suis un journal dont la rédaction a été massacrée au cœur de Paris par deux intégristes musulmans de nationalité française pour avoir publié des dessins se moquant du prophète Mahomet. Chaque fois que la phrase a été prononcée, à savoir des dizaines de millions, y compris par ceux qui n’en pensaient rien, c’est cette réalité-là qui a été énoncée.  
  
Cela risque d’énerver Laurent Joffrin, de crisper Edwy Plenel, de révolter Clémentine Autain et de faire grincer un certain nombre de dentitions qui auraient beaucoup donné pour que les faits ne soient pas si têtus, mais c’est comme ça. Aussi, au lieu de nous écharper pour savoir si cette marche nationale, ayant couvert la France de gloire et d’honneur, profite à telle ou telle vision du monde ou bénéficie davantage aux fâcheux angélistes qu’aux grincheux du repli sur soi, il est urgent de décider que cette mobilisation doit être la dernière, la der des ders, comme on disait de la guerre de 14-18 (avec le succès que l’on sait...). Personne ne souhaite en effet, même si le message envoyé au monde fut retentissant, que les conditions ayant provoqué cette tragédie soient de nouveau réunies. 
  
Comme le répètent très solennellement Gérard Biard, rédacteur en chef de Charlie Hebdo, et Richard Malka, son avocat : 
« Nous allons nous battre pour sauver une valeur fondamentale de notre république : la laïcité ».
Cette laïcité qui est le ciment du socle sur lequel repose notre cohésion nationale ; cette laïcité qui doit, soit éviter que la République perde des territoires, soit permettre qu’elle les reconquiert. Non, cette laïcité — sans laquelle il n’est plus possible d’envisager la coexistence civique des différentes confessions qui composent la patrimoine cultuel français — n’est pas négociable. « La laïcité ou la mort » aurions nous pu clamer durant cette journée mondialement historique, parce que la laïcité est le véritable terreau de l’identité nationale, la clé du vivre ensemble dans nos différences et nos divergences, la règle de l’altérité acceptée comme une diversité et non comme une division. Elle doit être ajoutée à la trilogie républicaine. 
  
C’est précisément de ne pas avoir su affirmer avec fermeté la prééminence légale de la laïcité sur toute autre considération sociale dans ce pays qui a favorisé la lente dégradation de l’autorité morale à l’école et des principes de citoyenneté. A force de concessions et de compromissions, de renoncements en abandons, la classe politique a laissé la loi de Dieu, quel qu’il soit, supplanter la loi de l’Etat. Et à certains représentants de Dieu, le pouvoir de dicter aux enfants leur comportement au sein de l’enceinte scolaire y compris durant les cours. Privés de ces repaires fondamentaux, certains cerveaux crétinisés et bestialisés ont considéré qu’ils pouvaient appliquer la loi de Dieu les armes à la main.                  
La laïcité totale est le meilleur rempart contre   l’islamophobie, l’antisémitisme et toutes les xénophobies. 
  

On ne dira jamais assez la catastrophe que fut le refus de Lionel Jospin de prendre ses responsabilités politiques lors de la première affaire du voile islamique, alors qu’il était ministre de l’Education nationale du gouvernement de Michel Rocard, en octobre 1989. Interpelé par un proviseur de Creil ayant refusé l’accès de son collège à trois élèves musulmanes portant un foulard, Jospin avait, « au nom du respect de la différence culturelle », et en se défaussant sur le Conseil d'Etat, refusé d’appliquer la directive Jean Zay de 1936, parfaitement explicite, en laissant à chaque chef d’établissement le soin de gérer la situation « par le dialogue ». 

  
Le cri d’alarme poussé par le philosophe Guy Coq dans la revue Esprit résumait alors les enjeux tout en annonçant les crises à venir : « C’est le maintien même de la tolérance qui périrait si les communautés religieuses entraient en compétition pour s’emparer de l’espace laïc de l’école, pour en briser l’unité, pour y manifester, non pas l’esprit d’accueil pour chaque individu en lui-même, comme simple humain, mais le signe de la clôture de chaque communauté contre les autres ». Il s’agit tout simplement pour la République d’éviter que la main de Dieu ne soit brandie par les bons apôtres de l’identité culturelle. On sait aujourd’hui ce qu’il en coûte d’être tolérant avec l’intolérance : les ennemis de la liberté en viennent à assassiner la liberté pour en avoir disposé à leur guise. Le moment est donc venu de dire stop. 
   
La responsabilité de ceux qui définissent l’interdiction d’arborer ostensiblement un signe ou un vêtement religieux dans un lieu public, ou l’obligation pour un élève d’assister à un cours dont le contenu n’est pas conforme à sa croyance religieuse, comme un « intégrisme laïc », sous prétexte qu’il y aurait une discrimination de l’individu par discrimination des consciences, est immense dans la progression du fondamentalisme islamique au sein de la jeunesse de confession ou de culture musulmane. Nos concitoyens musulmans qui sont ici chez eux, et dont la France a besoin pour être la France, ne doivent pas vivre cette laïcité comme un devoir mais comme un droit. De l’homme ! Ceux qui les en dissuadent sont précisément ceux qui refusent d’en faire des Français libres. La République n’est pas une religion, c’est une patrie, et elle est la leur à part entière. Le nier c’est la tuer. Il ne faut donc plus rien céder ni concéder sur la laïcité, jamais, nulle part. 

« Désormais, il apparaît enfin au grand jour que les monothéismes sont plus frères que frères ennemis. Face aux avancées sociétales qui se révèlent vraiment postchrétiennes (avortement, contraception, mariage homosexuel, GPA, PMA…), elles constituent un front commun pour lequel l’ennemi, c’est toujours l’athée ! La laïcité comme respect de toutes les religions, c’est la porte ouverte aux surenchères religieuses. Il n’est pas dans la nature du judaïsme d’être prosélyte, on naît juif ou on ne l’est pas. Le christianisme n’a plus les moyens d’être prosélyte – encore qu’il reprenne du poil de la bête avec les succès engrangés par l’islam, ce qui lui donne des idées…
En revanche – je renvoie à la lecture du Coran, pas à l’ouï-dire médiatique sur l’islam, mais au Coran et à sa lecture plume à la main –, il est dans la nature de l’islam d’être prosélyte et conquérant.               Que les médias le veuillent ou non, c’est dans le texte,                               confirmé par les hadith et la biographie du Prophète.
A quoi bon une laïcité respectant toutes les religions face aux revendications théocratiques consubstantielles à l’esprit prosélyte ? « Ouverte » ou « fermée », la laïcité n’est plus l’instrument qui permettra aux démocraties de subsister face à ceux pour lesquels elle n’est pas une vertu, mais le vice même. L’histoire se fait avec les minorités agissantes, pas avec les majorités silencieuses.
 »
 

Michel Onfray : "Le tribal fait désormais la loi"

Lundi 24 Novembre 2014


 A moins que l’on ne préfère prendre le risque de flirter un jour avec la guerre civile, il faudra bien avoir le courage de prendre le taureau par les cornes. Sans quoi, hélas pour nos enfants, il ne suffira plus de dire       « Je suis Charlie » pour soigner le mal.