QUAND L'UMP DÉFINISSAIT SA "STRATÉGIE"
FACE AUX QUESTIONS DE SOCIETE
La loi sur le mariage entre personnes de même sexe date de 2005
en Espagne. Le Codigo Civil (code
civil) prévoyait, en son article 44 CC, que "l’homme et la femme ont le
droit de contracter mariage conformément aux dispositions du présent
Code".
La loi de juillet
2005 précise : "La loi permet que le mariage soit célébré entre
personnes de même sexe ou de sexe différent, avec une plénitude et une égalité
de droits et obligations quelque soit sa composition. Par conséquent, les
[effets] du mariage (...) seront les mêmes dans tous les domaines,
indépendamment du sexe des contractants ; et notamment dans tout ce qui se
réfère à des droits et à des prestations sociales, comme
la possibilité d’entamer une procédure d’adoption."
Elle est complétée par des articles remplaçant les termes
"père" et "mère" ou "mari" ou "femme" lorsque c’est nécessaire, par le terme
"conjoint".
A l'UMP, on réfléchit. En 2009, Hervé Mariton, député
de la Drôme, a été chargé de plancher sur un rapport intitulé : "Reprendre la main sur les questions de société, quelle méthode
pour quels choix ? Ce document de 214 pages fait le point sur les
positions de l'UMP sur diverses questions comme celles du mariage homosexuel et
des mères porteuses. Il pose une "méthodologie", expliquant qu'il
faut aborder ces questions "en se donnant le temps d'un
travail de fond et d'une prise de recul", mais aussi en étant attentif
à ce qu'en dit l'opinion.
Les élus UMP sont aussi incités à être attentifs au
vocabulaire. Ainsi, explique le rapport p. 22, "mères porteuses a une connotation utilitaire tandis que la
gestation pour autrui a une connotation altruiste". Hervé
Mariton s'interroge longuement sur la manière de "donner un contenu nouveau à la modernité en imposant notre
agenda politique".
Un passage du texte est
particulièrement intéressant :
Suivent des exemples de thèmes à mettre en avant,
parmi lesquels "l'intérêt de l'enfant" :
"Plutôt que de donner l'impression
qu'on s'oppose à la liberté des femmes qui veulent recourir à la GPA, il faut mettre en avant la
protection du plus vulnérable, c'est-à-dire la protection de l'enfant et la
dignité de la mère porteuse. Il faut montrer que le désir
du parent mérite certes de la compassion mais que le droit à l'enfant n'est pas
recevable face au droit de l'enfant et à la marchandisation du corps de la mère
porteuse."
Un peu plus loin, le rapport résume les dialogues
tenus avec plusieurs intervenants, mais aussi Nadine Morano, venue en tant que pro-GPA.
Mi-2008, la ministre de la famille,
Nadine Morano, interrogée sur les propositions
du groupe de travail sénatorial, se dit "d'accord avec
l'ensemble des conditions posées" et affirme que si sa fille était
stérile, elle serait prête à porter son enfant. "Je le ferais. Pour moi, ce serait un
geste d'amour", assure-t-elle, alors même que le groupe de
travail du Sénat recommande d'interdire la
gestation d'une mère pour sa fille.
En avril 2009, Mme Morano explique
au Parisien : "Je me suis clairement exprimée, dès
2006, lorsque j'étais députée et membre de la mission d'information
parlementaire sur le droit de l'enfant et de la famille : je suis favorable à
la légalisation de la gestation pour autrui, très encadrée, dans une démarche
altruiste et non marchande." Et d'ajouter, évoquant son
parti politique
: "Ma conviction profonde est
que nous pouvons évoluer."
Mme Morano s'oppose frontalement sur
ce point à sa collègue ministre de la ville, Christine
Boutin. Nadine Morano estime
que Christine Boutin est "passionnée",
mais juge qu'elle "apporte
beaucoup de confusion parce que le Sénat est très précis dans ses
conditions", rappelant
que la mère porteuse ne doit "en
aucun cas être la mère génitrice, c'est-à-dire la mère biologique". "La mère porteuse n'intervient
que pour porter, donc il n'y
pas de confusion de filiation", assure la ministre.
Selon le résumé qui est fait de cette intervention,
l'actuelle vice-présidente de l'UMP, Michèle Tabarot, intervient pour "préciser qu'on pourrait envisager la GPA pour
d'autres femmes".
LA FONDAPOL, PROCHE DE L'UMP, POUR LA GPA
Nous sommes alors à trois ans de l'élection
présidentielle, et le parti n'a pas encore suivi Nicolas Sarkozy dans la
stratégie de "droitisation"' qui marquera la fin de son mandat, entre
"identité nationale", débat sur la laïcité ou discours de Grenoble.
Et sur les questions de sociétés, le parti est hésitant. C'est
ainsi que Jean-François Copé, son secrétaire général, explique, le 11 mars 2010 à la
Sorbonne, que, s'il était jusqu'ici "hostile" au
mariage homosexuel, "aujourd'hui
je ne sais plus, comme sur un certain nombre d'autres sujets. (...) Je ne suis
pas tout à fait clair, je revendique le temps de la réflexion". Et
de conclure : « Il est des sujets pour lesquels, de temps en temps, il faut des
rendez-vous de conscience personnels. Ça a été le cas pour la peine de mort et
le pacs… »
En 2011, le
think tank Fondapol, proche de l'UMP, évoque "12 idées pour 2012"
dans une brochure destinée à aiguiller les candidats. Il s'y montre particulièrement ouvert sur les questions
de société, prônant l'ouverture du mariage et de l'adoption aux personnes
de même sexe, mais aussi la légalisation de la GPA pour les couples "mariés
ou pacsés", y compris homosexuels.
La même année, alors que Nicolas
Sarkozy prépare sa campagne, il laisse filtrer dans la
presse la piste d'un éventuel changement de position quant au mariage
homosexuel, destiné à séduire sur sa gauche. Dans un entretien au magazine Têtu,
il se justifie en expliquant que son choix de ne pas souhaiter de mariage n'est "pas excluant",
car "je dis, et je crois que
c'est la première fois qu'un président de la République le dit, que deux
homosexuels élevant un enfant, ça peut très bien se passer".