vendredi 1 juin 2018

Macron à l'Elysée : pour l'économiste Philippe Aghion, "le compte n’y est pas"

"Il faut libéraliser, mais il faut aussi protéger""Le compte n’y est pas".

rappelle l'économiste, qui avait apporté son soutien à Emmanuel Macron lors de la campagne 2017.

Un an après l'élection d'Emmanuel Macron, l'économiste Philippe Aghion livre un premier bilan – loin d'être positif – de l'action du chef de l'Etat, auquel il avait apporté son soutien lors de la campagne présidentielle. "Je suis un peu inquiet"..."On est à une croisée des chemins : est-ce qu’Emmanuel Macron essaie de faire évoluer le modèle social français pour le rapprocher du modèle scandinave ? Ou bien est-ce qu’il va finir par faire du 'néo-giscardisme' ?""Il peut en effet y avoir la tentation de se dire que, finalement, le plus simple serait d’occuper le terrain à droite et de renoncer à chercher à mettre en place en France un véritable social-libéralisme à la scandinave." "On ne peut pas avoir une économie innovante sans une recherche fondamentale bien dotée et bien gouvernée en amont des grandes entreprises. Or en France, cette recherche fondamentale se trouve plongée dans une misère absolue. Dans ces conditions, comment voulez-vous que je réagisse lorsqu’on propose de généraliser la suppression de la taxe d’habitation ? Cela coûte 10 milliards de plus : trois fois le budget du CNRS !". 
"il faut qu’Emmanuel Macron montre que le social et la recherche comptent pour lui. On peut faire tous les discours qu’on veut pour dire que la France doit devenir attrayante pour les chercheurs étrangers : tant qu’on met aussi peu de moyens à leur disposition, elle ne le sera pas".
"François Hollande a présenté un agenda de réformes qui dessinent à nos yeux la voie souhaitable. La crédibilité, l'ambition et la cohérence sont de son côté. François Hollande a raté l’occasion de réformer le pays. Il y a certes eu des choses qui allaient dans le bon sens [...] Mais sa politique économique et sociale a manqué de cohérence, François Hollande a manqué son rendez-vous avec l'histoire" 
Mais Philippe Aghion avait vu ses espoirs déçus. l'économiste a mis en garde l'exécutif sur les conséquences d'une politique qui ne serait pas assez inclusive.  "Si on fait du Thatcher on obtient le Brexit, si on fait du Reagan, on obtient Trump", a-t-il prévenu. "Il faut libéraliser, mais il faut aussi protéger [...] Si on libéralise sans protection sociale, on créé du populisme", a-t-il mis en garde.

mercredi 30 mai 2018

Non interdiction pour le glyphosate,


Interdiction du glyphosate : les 63 députés qui ont voté contre l'inscription dans la loi

Tard dans la nuit, l'Assemblée nationale a renoncé à fixer une date d'interdiction pour le glyphosate, cet herbicide classé cancérogène probable.



C'est un engagement personnel d'Emmanuel Macron : l'interdiction du glyphosate sur le territoire français d'ici à 2021 aurait pu être gravée dans la loi par un amendement déposé par le député LREM Matthieu Orphelin. Mais celui-ci a été rejeté dans la nuit de lundi à mardi par l'Assemblée nationale.
En tout, 63 députés ont veillé jusqu'à 2 heures du matin pour rejeter l'amendement (20 pour, 2 abstentions). Parmi eux, les chefs de file des députés LREM, Richard Ferrand, des députés MoDem, Marc Fesneau et des députés LR, Christian Jacob.
 Nouvelle-Aquitaine : 

LREM
Creuse
LREM
Deux-Sèvres
LREM
Gironde
MoDem
Gironde
LREM
Lot-et-Garonne
MoDem
Vienne

L'association Robin des Bois, avait dressé la carte des départements les plus consommateurs de glyphosate. Dans le top 10 figure le Finistère de Richard Ferrand – pas moins de 8 députés bretons ont voté contre l'amendement Orphelin.

"S'il y avait de la mauvaise volonté..."


Richard Ferrand a justifié son vote et celui de ses 35 ouailles en rappelant qu'il y avait déjà "un engagement politique clair, du président de la République, du gouvernement et de la majorité". "A ce stade, soyons en confiance", plaide le président du groupe LREM, pour qui "l'objectif est commun" avec Matthieu Orphelin, mais "la méthode diffère" :

"Pas besoin de légiférer pour interdire", renchérit Laurence Maillart-Méhaignerie, députée LREM d'Ille-et-Vilaine. "Dans l'esprit des états généraux de l'alimentation, nous faisons confiance aux acteurs pour organiser la fin du glyphosate d'ici trois ans." Comme noté par "le Parisien", elle avait pourtant cosigné à l'automne dernier une tribune dans "le Monde" réclamant à l'UE d'interdire l'herbicide "le plus rapidement possible". Un revirement qui concerne deux autres députées LREM, Christine Hennion (Hauts-de-Seine) et Valérie Thomas (Puy-de-Dôme).
A noter que les groupes "insoumis", socialiste et communiste n'étaient représentés que par un député chacun. S'ils avaient été au complet au moment du vote, l'interdiction du glyphosate, et donc de l'herbicide fétiche de Monsanto "Roundup", aurait théoriquement pu être votée.

Le glyphosate a été classé parmi les cancérogènes probables chez l’homme en 2015 par le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC). Les villes n’ont plus le droit de l’utiliser dans les espaces ouverts au public depuis le 1er janvier, et les particuliers ne pourront plus l’acheter en magasin à partir de 2019. Mais les agriculteurs, principaux utilisateurs de ce désherbant très puissant et dont beaucoup jugent contraignantes les alternatives, sont pour l'heure exemptés.
Matthieu Orphelin, tête de pont de cette proposition, a déclaré dès le lendemain au micro de RMC : « C'est parce que je crois que cette promesse présidentielle est importante qu'il fallait la graver dans le marbre. Ce n'est pas l'alpha et l'oméga, mais aujourd'hui il y a des alternatives qui existent, donc il faut accélérer le déploiement de ces alternatives, il faut accélérer l'accompagnement des agriculteurs. Sur ce sujet-là, on a loupé une occasion importante. »
Il est loin d’être le seul à faire part de sa déception. Le député des Bouches-du-Rhône Jean-Marc Zulesi a tweeté sur « l’occasion manquée », tout comme l’a confié à Mediapart Sandrine Le Feur avant le vote dont l’issue ne faisait déjà peu de doute.
Le week-end précédent, la députée du Finistère avait dû avaler son chapeau quand en pleine distribution de tracts auprès de militants, elle avait découvert un message de Stéphane Travert annonçant préventivement qu’il s’opposerait à toute inscription dans la loi, préférant responsabiliser les acteurs des filières, en bon macronien. La séquence, cocasse, avait été filmée pour l’émission C Politique de France 5, la montrant réagir par un spontané « Le salaud ! ».
L'amendement Orphelin, moins radical qu'un amendement de la députée non inscrite et ex-ministre de l'Ecologie Delphine Batho, également rejeté, prévoyait des dérogations possibles jusqu'en 2023.

Delphine Batho avait suscité la polémique mercredi dernier en affirmant que le syndicat industriel UIPP (réunissant Monsanto ou Bayer) avait eu accès à son amendement d'interdiction du glyphosate avant les parlementaires. Estimant que cet "exemple est rarissime", le président de l’Assemblée nationale François de Rugy a indiqué qu’une enquête menée en interne n’avait "pas permis de déterminer d’où venait la fuite".