Une organisation terroriste internationale a fait de la France sa
cible prioritaire, et voilà que des politiciens choisissent de souffler sur les
braises ? Ceux qui
reprochent aux autres d’avoir la main qui tremble ont hélas l’esprit qui
s’égare.
Au fond
de chaque homme civilisé se tapit un petit homme de l’âge de pierre, prêt au
vol et au viol,
et qui
réclame à grands cris un œil pour un œil.
Mais il
vaudrait mieux que ce ne fût pas ce petit personnage habillé de peaux de bêtes
qui inspirât la loi de notre pays.
Arthur Koestler et Albert Camus
Comme
si cela ne suffisait pas… Il a donc fallu qu’à la tragédie et à l’effroi se
mêlent la
polémique et l’indécence. La cohésion nationale s’est effondrée cette
fois-ci quelques heures à peine après le massacre deNice, sous
les coups de boutoir d’une opposition sans vergogne et surchauffée, dans une
surenchère qui
en dit long sur la tonalité de la prochaine campagne présidentielle.
Où
sont les hommes d’Etat à droite quand celui qui est censé être le premier
d’entre eux déclare, au lendemain matin de l’attentat, que celui-ci aurait pu être évité ?
Pourquoi Alain
Juppé a dérapé… A
la baisse dans les sondages, l’ex-Premier ministre a haussé le ton contre le
gouvernement, de manière inhabituelle. Afin de ne pas laisser le champ libre à
Sarkozy sur le terrain sécuritaire. Sur qu’elles bases, sur quels éléments a-t-il bien pu
s’appuyer avant de prononcer une phrase aussi lourde de conséquences, alors
même que l’enquête n’avait pas commencé ? Qui ose encore parler de
responsabilité quand un ancien barde présidentiel, « Henri Guaino », visiblement plus familier des discours enfiévrés que du
maniement du lance-roquettes, ose suggérer que l’armée recoure à des armes de
guerre en pleine foule un soir de 14-Juillet ? "On
doit pouvoir stopper un camion qui ne répond pas aux sommations. (...) Il
suffit de mettre à l'entrée de la promenade des Anglais un militaire avec un
lance-roquettes et il arrêtera le camion" Où sont la franchise et l’honnêteté quand un ancien président de la
République refuse de reconnaître que la baisse des effectifs de police qu’il
dénonce n’a
jamais été aussi importante que lorsqu’il occupait l’Elysée ? Et que les solutions qu’il préconise aujourd’hui sont pour
certaines déjà mises en œuvre, pour les autres inapplicables ou carrément hors
sujet ? Où sont passées enfin l’éthique et la gravité, au sens latin du terme,
quand un porte-parole du premier parti d’opposition ose s’exclamer que la
France se divise désormais entre ceux qui sommeillent et ceux qui agissent ? Il faut avoir l’esprit sacrément
tordu ou stupidement revanchard pour laisser croire que le gouvernement,
paralysé par son prétendu angélisme ou je ne sais quelle sinistre impuissance,
s’accommoderait de ces tragédies à répétition qui frappent depuis deux ans les
Français.
Faut-il
rappeler à tous ces matamores en costumes sombres et aux sourcils froncés le
nombre de morts, le nombre de blessés, le nombre de traumatisés ? Tous
les coups ne sont pas permis en politique, pas même quand se joue une primaire avec une élection présidentielle à la clé. Et ceux qui reprochent aux
autres d’avoir la main qui tremble ont hélas l’esprit qui s’égare.
Alain Juppé estime
que "si tous les moyens avaient été
pris", l’attentat de Nice "n’aurait pas eu lieu", Nicolas Sarkozy que "tout ce qui
aurait dû être fait depuis dix-huit mois ne l’a pas été", quand Marine Le Pen pointe des "carences gravissimes de l’Etat".
Face au terrorisme, le maximum a-t-il selon vous été mis en œuvre ? Ces déclarations qui ont immédiatement suivi l'attentat sont nauséabondes et relèvent d'une attitude politicienne qui ne
grandit pas la classe politique dans son ensemble. Des familles de victimes
sont encore dans l'attente d'informations et les cadavres sont encore chauds.
Ce qui a été mis en place par le gouvernement
pour faire face au terrorisme est sans précédent en termes de moyens humains et
financiers. En tout, trois lois sur le terrorisme et une sur le renseignement.
Alors oui, nous pouvons toujours faire mieux, et les moyens actuels doivent
continuer à s'améliorer. C'est le sens des 40 propositions formulées par
la commission d'enquête parlementaire sur les attentats. Nous
sommes face à un terrorisme qui mute, les dispositifs ne doivent pas être figés
dans le temps.
Une
organisation terroriste internationale, sans doute la plus folle et la plus
meurtrière qu’on ait jamais connue, a choisi de faire de la France sa cible
prioritaire. Nos militaires l’affrontent chaque jour sur tous les terrains que
ces fous de Dieu ont choisi d’opprimer. Nos policiers la combattent chaque jour
sur notre sol, dans des conditions très souvent compliquées. Nos concitoyens
font corps, comme ils le peuvent et malgré la peur, pour continuer à vivre
ensemble et ne pas offrir aux terroristes de Daech le chaos qu’ils souhaitent
précisément provoquer. Et voilà que des politiciens, avant tout
préoccupés par leurs courbes sondagières, choisissent de souffler sur les
braises ? Les électeurs ont
la mémoire courte, c’est vrai. Mais on espère qu’ils n’oublieront pas qu’en ces
circonstances épouvantables certains en ont profité pour tenter de se refaire
une santé en racontant n’importe quoi.
L'ancien
Premier ministre Jean-Pierre Raffarin revient sur l'escalade politique de ces
derniers jours, et s'alarme des interpellations par médias interposés, face au
monde entier. En appelant à la
"responsabilité" de tous, hommes politiques inclus. Etait-ce le signe
de votre réprobation alors que les ténors de la droite se lançaient dans une
surenchère sécuritaire ? Ce nouveau
drame impose un temps de recueillement, un temps de silence. Tous devraient
l'observer pour que chacun puisse mesurer la profondeur de la tragédie… La
colère des uns, l'indignation des autres et le jeu politique des troisièmes ont
conduit à de nombreuses déclarations qui me paraissaient anticipées. Après ce temps "sacré", il est normal que, face à la
répétition de ces drames, nous ayons un débat sur l'action publique. "Mais ce débat doit être à la hauteur de la
situation. Sinon, l'exploitation partisane de tels événements ajoute le
ridicule à la douleur."
“Nous avons bien des préjugés à vaincre,
Avant de concevoir seulement que la source de
toutes les mauvaises lois, que l’écueil de l’ordre public,
C’est
l’intérêt personnel, c’est l’ambition et
la
cupidité de ceux qui gouvernent.”...
Robespierre
Prétendre qu’on
pourrait surveiller, ficher, interner, expulser tout le monde ou presque, au
mépris des principes qui fondent notre démocratie et des règles de droit qui
régissent notre société, est à la fois une folie et un mensonge. La lutte
contre la menace terroriste sera longue. Elle nécessite qu’on s’y adapte en
permanence, qu’on y accorde encore davantage de moyens à l’évidence et même
qu’on revoie une fois encore notre arsenal législatif, si besoin est.