lundi 15 juin 2020

« Souveraineté », « indépendance »...


Le chef de l’Etat a mis en avant à plusieurs reprises la notion d’indépendance lors de son allocution du 14 juin. La tonalité souverainiste des discours du président depuis le début de la crise sanitaire étonne.

Elle renvoie à un épisode méconnu : son passage au Mouvement des citoyens de Jean-Pierre Chevènement à la fin des années 1990.

« Retrouver notre indépendance pour vivre heureux et vivre mieux » ; « La consolidation d’une Europe indépendante » ; « Notre indépendance technologique, numérique, industrielle et agricole » ; « Ce projet d’indépendance »… 
Lors de son allocution, dimanche 14 juin, Emmanuel Macron a prononcé une demi-douzaine de fois le mot « indépendance ». Ce n’est pas la première fois depuis le début de la crise sanitaire que la parole présidentielle prend des accents souverainistes. Une tonalité patriotique qui, trois ans après son arrivée à l’Elyssée, interroge mais qui renvoie à un épisode souvent passé sous silence de la trajectoire du chef de l’État, son engagement au sein du Mouvement des Citoyens (MDC) de Jean-Pierre Chevènement à la fin des années 1990.
C’est un déjeuner qui ne figure pas à l’agenda officiel de la présidence de la République. Un rendez-vous qui doit se dérouler à l’abri des regards indiscrets. Ce mercredi 6 mai, dans le huis clos du palais de l’Elysée, à quelques jours d’un déconfinement qui s’annonce à haut risque, Emmanuel Macron reçoit Jean-Pierre Chevènement. Quatre fois ministre, figure tutélaire de la gauche républicaine et étatiste, le « Che », 81 ans, occupe une place singulière dans l’édifice macronien : il est, depuis le début du quinquennat, l’un de ceux qui murmurent à l’oreille du président. A intervalles réguliers, et « toujours à des moments clés de son mandat » L’allocution d’Emmanuel Macron, fut un exercice de haute voltige politique. Comment récupérer le bénéfice de la sortie de crise sanitaire pour se lancer dans la bataille de la reconstruction et prendre de vitesse ses éventuels rivaux dans la course à l’élection présidentielle de 2022 ? Lâchant un trapèze pour en agripper un autre, l’acrobate de l’Elysée s’est encore une fois élancé sans filet, au-dessus du vide. Roulez tambour !
« Nous n’avons pas à rougir, mes chers compatriotes, de notre bilan. Des dizaines de milliers de vies ont été sauvées par nos choix, par nos actions. […] La période a montré que nous avions du ressort, de la ressource, que, face à un virus qui nous a frappés plus tôt et plus fort que beaucoup d’autres, nous étions capables d’être inventifs, réactifs, solides. Nous pouvons être fiers de ce qui a été fait et de notre pays. » Seul en piste, il a pris son élan en annonçant une bonne nouvelle : le passage au vert de l’ensemble du territoire à l’exception de Mayotte et de la Guyane. « Nous allons donc pouvoir retrouver le plaisir d’être ensemble, de reprendre pleinement le travail, mais aussi de nous divertir, de nous cultiver. Nous allons retrouver pour partie notre art de vivre, notre goût de la liberté. En somme, nous allons retrouver pleinement la France. »
 Les Français, fort défiants à son égard, jugeront aux actes et surtout aux résultats. « Je m’adresserai à vous en juillet pour préciser ce nouveau chemin, lancer les premières actions et cela ne s’arrêtera pas », jure le président. Bateleur, il annonce déjà sa prochaine pirouette. Au grand dam de ces adversaires relégués au rang de simples spectateurs, l’acrobate n’est toujours pas tombé.

Sylvain Courage