« Il a été décidé qu’on reparlerait, dès les petites classes, d’éducation civique,
d’honnêteté, de courage, de refus du racisme et
d’amour de la République.
Il est dommage que l’école ne soit fréquentée que par les enfants. »
André Frossard
Le Front national ne se combat pas seulement avec des mots ou avec des slogans. Il faut mettre de la raison dans la critique pour démontrer tout ce que son programme a de déraisonnable.
On peut reprocher bien des choses à
Manuel Valls, sur le fond de sa politique comme sur la forme. On peut contester
sa ligne sociale-libérale, discuter ses grandes orientations économiques,
déplorer l’absence de résultats. On peut railler son goût de la communication,
ses formules à l’emporte-pièce ou ses méthodes de bulldozer. On voit mal en
revanche comment on pourrait critiquer la mobilisation générale qu’il vient de
décréter contre le Front national.
A
quinze jours des élections départementales, le Premier ministre mouille la
chemise pour faire campagne et c’est bien normal. Il alerte et s’alarme, confesse sa "peur" de voir son pays se fracasser si le parti de
Marine Le Pen l’emportait. Et voilà que monte dans les rangs de la droite,
mais aussi d’une partie de la gauche, une petite musique qui voudrait nous faire
croire que tout cela ne sert à rien d’autre qu’à faire monter… le Front
national. Comme si cela n’était pas déjà le cas. Comme si le parti lepéniste
n’était pas arrivé en tête dans 71 départements aux élections européennes
l’année dernière.
Les
petites phrases de Valls arrivent bien tard, disent les uns. Et alors ?
Serait-ce une raison pour ne rien dire, ne rien faire et baisser les bras ?
Elles masqueraient des arrière-pensées politiciennes, arguent les autres. La
belle affaire ! Comme si eux n’en avaient pas. Elles traduiraient enfin,
poursuivent les contempteurs, une forme de chantage sur l’air bien connu du vote
utile et de la posture morale. Rappelons à tous ceux qui l’auraient oublié que
le vote utile a ceci d’utile qu’il permet justement que le Front national ne
gagne pas. Et que la morale en politique n’est pas un gros mot, mais une
ambition respectable.
A ceux qui en douteraient, le parti lepéniste n'a pas changé
Manuel
Valls a donc raison de sonner le
tocsin. Car après le 22 mars, il ne sera plus temps. Disons-le ici, le FN ne se
combat pas seulement avec des mots ou avec des slogans. Il faut mettre de la
raison dans la critique pour démontrer tout ce que son programme a de
déraisonnable. Il faut surtout mener une politique efficace pour lui éviter de
proliférer sur la crise et la peur.
Mais
il faut aussi parfois nommer le mal. Et ce n’est ni diaboliser ni stigmatiser
que de souligner que ce parti héberge d’authentiques racistes, des homophobes
patentés, des nostalgiques d’une extrême droite issue des heures les plus
sombres de notre histoire. A ceux qui en douteraient, comme à ceux qui
estiment que le parti lepéniste a changé ou qu’il s’agit là d’un procès d’un
autre âge, on ne saurait trop recommander la lecture du sinistre florilège de citations que nous avons relevées chez ses candidats
aux départementales. Leurs mots, leurs obsessions, leurs injures sont bien
restés les mêmes. On n’en fait jamais trop contre le Front
national.
Matthieu
Croissandeau