vendredi 18 octobre 2013

Celui qui fait la loi sait mieux que personne comment elle doit être éxecutée & interprêtée. J. J. Rousseau Rousseau


En pleine année Albert Camus, on cite régulièrement une phrase de lui,  
« mal nommer les choses, c'est ajouter au malheur du monde ». 
Alors, après l'expulsion d'une famille en France depuis 4 ans et 10 mois, un petit rappel :
 "il y a des actes illégaux, pas des hommes illégaux, pas des êtres illégaux ".

 EDWY PLENEL




« La manière dont la petite Léonarda a été “prise en charge par la police”,
 comme dit le ministre de l'intérieur, ne correspond ni à l'esprit ni à la lettre de ce qui est prévu en matière d'étrangers en situation irrégulière »,
 affirme la députée de Paris et secrétaire nationale du PS à l'immigration, qui s'en prend également au préfet du Doubs.

dans le cadre d'une sortie scolaire la semaine dernière, soit « convoqué et sanctionné ».
Selon elle, cet ancien responsable du ministère de l'immigration et de l'identité nationale a agi par « provocation politique ».
Mais elle n'épargne pas Manuel Valls. 
 « La manière dont la petite Leonarda a été “prise en charge” par la police, comme dit le ministère de l'intérieur dans son communiqué de mardi soir, ne correspond ni à l'esprit ni à la lettre de ce qui est prévu 
en matière d'étrangers en situation irrégulière. »



 La ligne du gouvernement, c'est la lisibilité de la loi, le respect du droit, la fermeté mais aussi l'humanité. Dans ce cas-là, on est en dehors de toutes les cordes. Une circulaire de novembre 2012 précise les critères de régularisation. Dans ces critères il y a la durée de présence sur le territoire, l'activité professionnelle, la scolarisation des enfants, etc. Le préfet a pris une décision symboliquement choquante, dans la sphère de l'école : c'est tout ce qu'on a condamné pendant des années. En pratique, elle est en contradiction avec les pouvoirs des préfets : à huit semaines près, au titre des critères de cette circulaire, la famille de Leonarda était régularisable.
Mais Manuel Valls n'a pas déjugé le préfet du Doubs. Mardi soir, il a même affirmé dans un communiqué que « le ministre de l’intérieur (…) applique avec fermeté les décisions d’éloignement tout en veillant scrupuleusement au respect des droits des étrangers ».
Nous portons donc une appréciation différente sur l'adverbe « scrupuleusement ». Dans scrupuleusement, il y a le mot « scrupules »… En tout cas, une enquête administrative a été déclenchée mercredi matin. Se poser des questions sur les conditions dans lesquelles cette toute jeune fille a été “prise en charge”, comme dit le ministre de l'intérieur, par les services de police n'est donc pas une vue de l'esprit.
Mais s'agit-il seulement d'un excès de zèle d'un préfet ? Le ministre de l'intérieur, qui ne l'a pas déjugé, a-t-il selon vous commis une erreur politique ?
C'est d'abord et avant tout la décision d'un préfet dans le plein exercice de ses prérogatives, qui connaît parfaitement la question car il a été secrétaire général du ministère de l'identité nationale sous Nicolas Sarkozy. Il connaît tout ça par cœur. Il connaît forcément la circulaire de novembre dernier. Il connaît le pouvoir discrétionnaire des préfets en la matière. Donc je ne suis même pas sûre que ce soit du zèle. Je me demande si ça ne relève pas d'une autre logique.
C'est-à-dire ?
Une logique de provocation politique.
Contre le gouvernement ?
Oui. La politique d'immigration de ce gouvernement n'est pas la même que celle menée par Sarkozy et ses ministres successifs de l'immigration et de l'intérieur. La circulaire de novembre dernier permet de ne pas être dans l'arbitraire total, l'opacité totale, l'inégalité absolue qui régnaient sous l'ère Sarkozy. Les régularisations étaient menées selon des critères échappant à toute rationalité, qui différaient d'un département à l'autre, en fonction des préfets. Si cette circulaire existe, c'est parce que François Hollande a expliqué pendant sa campagne qu'il y aurait des régularisations au cas par cas, fondées sur des principes clairs. Notre position repose sur le droit.
Quelles doivent en être les conséquences ?
Le préfet doit être convoqué et sanctionné. Je suis très satisfaite que ce matin une enquête administrative soit annoncée. Les responsabilités de cette interpellation scandaleuse doivent être établies.
La responsabilité politique de M. Valls n'est-elle pas aussi engagée ? Surtout après sa récente sortie sur les Roms, qui avait suscité votre indignation et celle de nombreux responsables socialistes ?
C'est notre responsabilité collective qui est engagée. Le PS, par la voix de son porte-parole, s'est exprimé dès mardi soir. Le président du groupe PS à l'Assemblée nationale l'a fait aussi. Le premier ministre, lui, a indiqué qu'il y aurait une enquête administrative. Ces actes et ces déclarations sont conformes à nos convictions, à ce que nous avons écrit, à la politique que nous avons proposée.
Manuel Valls peut-il continuer à soutenir le préfet du Doubs ?
Manifestement non puisqu'une enquête administrative est ouverte… 
Après l'affaire des Roms, cette affaire ne risque-t-elle pas d'agrandir la rupture à gauche sur ces sujets ?
Je crois tout l'inverse. Ces événements nous fournissent au contraire l'occasion de réaffirmer un certain nombre de principes.
Le premier ministre Jean-Marc Ayrault a vivement contredit son ministre de l’intérieur mercredi et annoncé qu’en cas de « faute », l’arrêté de reconduite à la frontière de la famille de Leonarda sera « annulé ». « La base de l’État républicain, c’est le droit. Mais la base de l’État républicain, c’est aussi l’humanité et la fraternité », a insisté Ayrault. La fracture provoquée par la politique de Manuel Valls au sein du gouvernement apparaît pour la première fois de manière claire.
 

Vieillissement des centrales : la France ne peut plus faire machine arrière


Que se passerait-il si le prolongement de la durée de vie du parc nucléaire n'était pas acté ? Certains murmurent que nous risquerions la pénurie d'électricité. 
Le gouvernement se retrouve piégé. Explications.


Le ministre de l’Ecologie ne veut pas d’emballement. « Ce ne sont pas les commissaires aux comptes d’EDF qui décideront de la politique énergétique de la France », a-t-ilrassuré ce mardi après l’annonce par le Journal du Dimanche d’un probable allongement de la durée de vie du parc nucléaire français jusqu’à 50 ans. La décision n’est pas prise officiellement, donc. Mais elle semble inéluctable.

Trouver l’énergie de 11 EPR d’ici à 2022

« Le scénario industriel implicitement retenu aujourd’hui est celui d’un prolongement au-delà de 40 ans », écrivait déjà la Cour des comptes dans un rapport publié en janvier 2012. En principe, l’arrêt des centrales est un tournant qui se prépare à l’avance. Depuis 2003 – année où l’âge limite a été repoussé de 30 à 40 ans – on savait que les premières constructions, celles de Fessenheim (Haut-Rhin) et du Bugey (Ain), devaient pousser leur dernier souffle au plus tard en 2018. Dans la décennie suivante, 13 des 19 centrales françaises (voir leur âge sur notre carte) étaient supposées les imiter. Dès lors, la France devait se préparer à une chute brutale de sa production d’électricité, fournie à 75% par son parc nucléaire. Dans son rapport, la Cour des comptes estimait que le pays devrait alors être capable d’économiser ou produire l’équivalent de l’énergie fournie par 11 EPR d’ici à 2022.
Sauf que dans les faits, quasiment rien n’a été fait. Le débat sur la transition énergétique n’a débuté que l’an dernier, l’EPR de Flamanville (dans la Manche) accumule les contretemps et au regard du marché du solaire et de l’éolien, l’objectif d’atteindre 23% d’énergies renouvelables en 2020 devient un rêve lointain. « Même si on lançait aujourd’hui de gros chantiers, le retard ne sera jamais rattrapé à temps, avant 2018  » constate l’un des participants au rapport de la Cour des comptes. Résultat, « si on ne prolonge pas la durée de vie des centrales, nous risquons tout simplement de ne plus avoir assez d’électricité », poursuit-il. Trop tard donc pour rebrousser chemin.

EDF évoque une durée de vie à 60 ans

Pour EDF, l’affaire semble classée. Lors de son dernier comité central d’entreprise mi-septembre, l’électricien a dévoilé son projet de « grand carénage » : 50 milliards d’euros d’investissements jusqu’en 2025 pour effectuer les révisions qui permettront à ses centrales d’atteindre non pas quarante, ni même cinquante, mais soixante ans de loyaux services. Soit le double de la durée de vie pour laquelle elles ont été mise sur pied.
Car en prolongeant une première fois de dix ans, la France a déclenché un engrenage. « On estime qu’il faut investir 55 milliards entre 2012 et 2025 pour faire fonctionner, dans de bonnes conditions de sécurité et de productivité, nos centrales jusqu’à 40 ans », rappelle-t-on à la Cour des comptes. Les dépenses liées au renforcement de la sécurité des installations suite à la catastrophe de Fukushima atteignent à elles seules 10 milliards d’euros. Quitte à investir, EDF espère rentabiliser sur quelques décennies.
La centrale de Fessenheim, dont l’arrêt a finalement été décidé pour 2016, fait figure de repoussoir. « En 2011, EDF a changé des pièces importantes comme les générateurs de vapeur », rappelle François Lévêque, professeur d’économie spécialiste de l’énergie à l’école des Mines de Paris. Cet investissement dit de « jouvence » a coûté la bagatelle de 150 millions d’euros. « Avec l’arrêt de la centrale en 2016, une bonne partie de cet argent sera perdu », poursuit l’économiste. Au contraire, en obtenant une prolongation de la durée de vie du parc, EDF mettrait toutes les chances de son côté pour que l’argent dépensé ne parte pas en fumée. Reste qu’« après 2025, on n’arrêtera pas de faire des investissements de maintenance, bien entendu. De nouveaux investissements seront nécessaires pour atteindre les 50 ans », explique-t-on à la Cour des comptes. Et ces nouveaux investissements devront à leur tour être rentabilisés. Jusqu’à ce que l’Autorité de sureté nucléaire (ASN), qui juge au cas par cas de la fiabilité des centrales, impose des mises à l’arrêt.

« Le nucléaire prend toute la place »

Pour l’association Négawatt qui milite pour une sortie du nucléaire, le cercle est encore plus vicieux qu’il n’en a l’air. « Le nucléaire prend toute la place et son abondance n’incite pas à miser sur l’efficacité ou la sobriété énergétique », s’emporte Marc Jedliczka son porte-parole. Si on fait perdurer ce monopole, les alternatives resteront au point mort et on sera confrontés au même blocage dans dix ans. » Pourtant, pour Bernard Laponche, ancien membre du Commissariat à l’énergie atomique (CEA), la solution existe : « Nous avons en France un très fort potentiel de réduction de la consommation d’électricité. C’est moins risqué et plus simple que de prolonger toujours la durée de vie des centrales. » Ainsi, si l’on se replonge dans le scénario de Négawatt, les 55 milliards dédiés à la prolongation du parc nucléaire pourraient tout aussi bien couvrir l’ensemble des rénovations thermiques à l’échelle du pays pendant trois ans, soit plusieurs centaines de milliers de bâtiments. L’inverse d’une fuite en avant.

Karachi : les silences et blocages de la gauche


À la suite d'une vraie-fausse déclassification de documents “confidentiel défense” par le ministère de l'intérieur, des parties civiles ont écrit à Manuel Valls pour s'insurger. L'audition de l'ancien ministre de la défense socialiste, Alain Richard, qui reconnaît dans un documentaire avoir étouffé judiciairement les soupçons de corruption, est réclamée.




La gauche n’a pas tenu parole. Plusieurs parties civiles de l’affaire Karachi ont écrit, le 4 octobre, à Manuel Valls pour manifester leur « incompréhension » suite à la non-déclassification de plusieurs documents essentiels du ministère de l’intérieur. Elles fustigent, sous la plume de leur avocate, Me Marie Dosé, « le peu de considération dont font preuve les autorités françaises pour aider à la manifestation de la vérité dans ce dossier ».
Durant la campagne présidentielle, le candidat François Hollande et son entourage avaient pourtant promis à plusieurs reprises, publiquement ou en privé, de déclassifier tous les documents confidentiels réclamés par la justice dans les deux volets de cette affaire, qu’il s’agisse de la corruption sur les ventes d’armes sous le gouvernement Balladur (1993-1995) ou des causes de l’attentat de Karachi, commis le 8 mai 2002.
Dans le monde du renseignement, certains imputent l’attentat aux services secrets pakistanais sur fond de corruption internationale. La justice, qui ne détient à ce jour aucune preuve d’un lien entre les volets financier et terroriste du dossier, n’exclut aucune hypothèse. 

Mais une fois au pouvoir, la gauche a laissé derrière elle ses promesses. Le 2 juillet dernier, le ministère de l’intérieur a en effet transmis au juge anti-terroriste Marc Trévidic une seule note des services de renseignements sur un homme clé du dossier, le cheik Ali Ben Moussalem, à la fois intermédiaire financier dans les ventes d’armes du gouvernement Balladur et financier secret d’Al-Qaida. L’homme d’origine saoudienne, mort en Suisse en juin 2004, était réputé être le chef de deux intermédiaires mis en examen dans le volet financier du dossier, Ziad Takieddine et Abdulrahman el-Assir.
Seulement voilà : sur les neuf pages de la note de juin 2004 déclassifiée, quatre sont totalement recouvertes de noir et les cinq autres sont une revue de presse. De quoi susciter l’exaspération des parties civiles.
Dans sa demande de déclassification, qui datait d’août 2012, le juge Trévidic réclamait pourtant à Manuel Valls la transmission de toutes les informations en possession des services de renseignements du ministère de l’intérieur sur « le rôle d’Ali Ben Moussalem dans les contrats Sawari II et Agosta (avec l’Arabie saoudite le Pakistan, ndlr), ses liens avec des organisations terroristes dont notamment et surtout Al-Qaida, son éventuelle mise à l’écart par le famille royale saoudienne, et son décès à Genève en 2004 ».

L'audition de l'ancien ministre Alain Richard réclamée

Mais le système de déclassification du secret défense est ainsi fait en France que le juge ne dispose d’aucun moyen légal pour s’assurer que les éléments qui ont été censurés par le ministère de l’intérieur – donc par le pouvoir exécutif – n’intéressent pas réellement son enquête.
« Cet unique document déclassifié n’est pas à même de participer à la manifestation de la vérité, s’alarme Me Dosé dans sa lettre au ministre de l’intérieur. La simple lecture de ce document très partiellement déclassifié établit que les services de renseignements ont nécessairement travaillé sur les activités d’Ali Ben Moussalem, dont ils savaient qu’il avait perçu des commissions exorbitantes sur des contrats d’armement français et qu’il apportait une assistance à Al-Qaida. »
La pauvreté des informations transmises par Manuel Valls au juge Trévidic est d’autant plus surprenante que la magistrat instructeur a récemment recueilli le témoignage d’un ancien informateur de la Direction de la surveillance du territoire (DST), Gérard Willing, un agent de renseignements privé proche du MI-6 britannique, qui a confirmé, sur procès-verbal, avoir transmis de nombreuses informations sur le cheik Moussalem qui ont fait l’objet « de plusieurs notes de contacts sur plusieurs mois ».  
« Il est établi que la DST a été destinataire d’informations concernant Ali Ben Moussalem (…) et a recueilli des renseignements durant des années sur le rôle de ce dernier, Monsieur el-Assir et de Monsieur Takieddine », s’étonnent les parties civiles. Elles réclament par conséquent des« investigations dignes de ce nom », mettant en cause la « frilosité » du gouvernement.De son côté, pour contourner les verrous français, le juge Trévidic a déjà envoyé plusieurs commissions rogatoires internationales, en Suisse et aux États-Unis, pour tenter d’obtenir là-bas les informations que le gouvernement ne daigne pas lui transmettre ici.
Reste que la frilosité socialiste dans ce dossier ne date pas d’hier. Comme Mediapart l’a déjà raconté, sous le gouvernement Jospin (1997-2002), Matignon et plusieurs ministères, à commencer par celui de la défense, avaient été informés des« malversations » opérées sur les contrats d’armements signés par le gouvernement Balladur. Mais la gauche n’avait rien fait, et surtout pas saisi la justice, malgré les informations explosives à sa disposition.
Dans un documentaire d’Arte et de Mediapart consacré à l’affaire, L’argent, le sang et la démocratie (visible ici), l’ancien ministre de la défense du gouvernement Jospin, Alain Richard, reconnaît, gêné, ne pas avoir voulu alerter la justice sur le système de détournement de commissions occultes mis en place par les balladuriens. Un silence qu’il justifie aujourd’hui, face caméra, par une crainte d’une montée du Front national – Jean-Marie Le Pen arriva néanmoins au second tour de la présidentielle en 2002 – et par le risque que la droite sorte à son tour des affaires embarrassantes pour la gauche...
Après la diffusion du documentaire mardi 15 octobre, l’avocat Me Olivier Morice, qui représente lui aussi plusieurs parties civiles du dossier, vient de réclamer l’audition d’Alain Richard devant le juge anti-corruption Renaud Van Ruymbeke, en charge du volet financier.

Autoroute A65

Les associations l’avaient dit et redit, et ce plusieurs années avant que ne soit coupé le premier arbre, la construction de l’autoroute A65 entre Langon et Pau est fondée sur des prévisions de trafic irréalistes qui ne peuvent qu’aboutir à la faillite d’Aliénor, la société concessionnaire, et à la récupération de la dette (environ 900 millions d’euros) par la collectivité.
Depuis l’inauguration de l’équipement, en décembre 2010, les faits parlent et le fiasco se dessine : Aliénor, qui vient de publier ses comptes, enregistre un résultat net négatif de 35,1 millions d’euros en 2012 (après -34,6 millions d’euros en 2011) soit 91,6% de son chiffre d’affaire (si si, vous avez bien lu). Selon l’analyse financière produite par Patrick Dufau de La Mothe[1], à ce rythme, la société sera en situation de faillite dans le courant 2014, ce qui nécessitera une recapitalisation par les actionnaires (Eiffage et la SANEF) ou bien, s’ils ne veulent pas, l’activation de la clause de déchéance prévue contractuellement et faisant retomber la dette sur l’Etat, la Région Aquitaine et les départements de Gironde, des Landes et des Pyrénées Atlantiques.
Durant les années où elles combattaient ce projet absurde, les associations n’ont eu de cesse d’avertir quant à ce risque financier, ne suscitant que l’indifférence des médias locaux et le mépris des élus. Les premiers n’ont pas fait leur travail, les seconds ont menti.
Nous savons de source interne à la rédaction que durant les années de débats et controverses sur l’autoroute, aucun journaliste de Sud-Ouest (qui détient localement le monopole de la presse écrite) n’a eu pour mission de travailler en profondeur le dossier financier de ce projet.[2] S’il y en avait eu un, il aurait pu (dû) réclamer avec les associations la transparence sur ce projet, et notamment la publication de l’analyse financière prévisionnelle permettant de juger de la rentabilité de l’infrastructure.
Car, il faut le vivre pour le croire, alors que toutes les analyses de l’Etat faites en amont concluaient à la non rentabilité du projet, le seul document disant le contraire, celui rédigé par le concessionnaire, n’a jamais été rendu public (ce qui est pourtant une obligation légale), ni à nous, associations, ni aux élus locaux engageant par leur vote du contrat de concession la solidarité de leur collectivité avec le projet. Nos recours auprès de la Commission d’Accès au Documents Administratifs n’y ont rien fait, pas plus que ceux auprès du Conseil d’Etat, qui dans un attendu qui ne laisse de surprendre jugeait en 2008 que :
« il ressort de l’examen des pièces du dossier que le Conseil Régional d’Aquitaine a délibéré sur le projet de convention relative au financement des concours publics pour la réalisation de l’Autoroute A65 au vu d’un rapport qui comportait l’ensemble des éléments d’appréciation utiles, en particulier sur la clause de déchéance du concessionnaire ; qu’ainsi les requérants ne sont fondés à soutenir ni que le conseil régional d’Aquitaine se serait prononcé sur le fondement d’informations insuffisantes et incomplètes, en violation des dispositions précitées, ni qu’il aurait de ce fait méconnu ses compétences ».
Le rapport de Patrick Dufau de La Mothe, confirme aujourd’hui que cet arrêt de la plus haute juridiction administrative du pays était, au mieux, du travail bâclé. Nous y apprenons en effet que le conseil régional d’Aquitaine «  a demandé une première fois en 2011 à Nathalie Kosciusko Morizet, puis une deuxième fois en 2012 à Frédéric Cuvillier, en leur qualité de ministre des transports, les documents contractuels, les comptes prévisionnels initiaux, comme ceux issus de l’avenant N°1 qui prolonge la concession de 5 ans. Elle n’a rien reçu… ! »
Les élus régionaux aquitains ont donc bien voté en 2006 sans être informés sur les risques qu’ils faisaient prendre à leur collectivité. Les présidents et vice-présidents de cet exécutif, ainsi que ceux des conseils généraux concernés, ont pourtant toujours certifiés avoir connaissance de ces éléments. A l’irresponsabilité sous-jacente à cette décision, que nous pressentions, s’ajoute donc maintenant la preuve du mensonge.
  JULIEN MILANESI
Sur le sujet, vous pouvez soutenir le film "L'intérêt général et moi", en cours de production: http://fr.ulule.com/linteret-general/


[1] L’expert comptable qui avait produit l’analyse financière des associations en 2008, aujourd’hui conseiller régional Europe Ecologie de la région Aquitaine,
[2] Les seuls à avoir fait ce travail d’investigation sont des journalistes du Monde, de France 2 et de CANAL +, soit aucune rédaction locale.