Préférer son patrimoine à sa patrie,
s'exiler pour échapper à l'impôt (...)
apparaissent comme des manquements à la
dignité et au civisme. (...)
Selon les articles R89 à R96 du Code de
la Légion d'honneur,
des sanctions disciplinaires (censure,
suspension, exclusion) 'peuvent être prises
contre tout membre de l'Ordre qui aura
commis un acte contraire à l'honneur'.
l'ancienne ministre
UMP Nadine Morano a surtout estimé qu'il était la victime du
"matraquage fiscal du gouvernement socialiste". Il
faut tout de même rappeler à cette ancienne ministre que pour l'instant personne
n'a payé d'impôts suplémentaires sur le revenu ou sur la fortune depuis
l'élection de François Hollande, le Président de l'Assemblée se lâche et dénonce
un comportement "qui n’est pas défendable" en comparant la volonté de
Gérard Depardieu de fuir l'impôt aux efforts demandés aux Français en 1914-1918
et en 1939-1945. "Ce n'est pas quand le pays est en difficulté qu'on dit :
'je ne veux pas faire d'efforts'. Les générations précédentes, l'effort
qu'on leur a demandé en 14-18 ou en 39-45, c'était de laisser leur peau". Et de
conclure :
"Là, on
leur demande de faire une contribution financière
pour
donner une chance à ce pays, à ses
valeurs".
Depardieu
ajoute le ridicule au lamentable !
il devrait
relire l'avare de Molière !
Dupont-Aignan@dupontaignan
Les envies d’exil fiscal de
Gérard Depardieu ne datent pas d’aujourd’hui. En 2004, à l’occasion d’un livre
d’entretien avec l’auteur de ces lignes (« Vivant ! » chez Plon), l’acteur
évoquait déjà cette éventualité. Voici la question que je lui avais alors posée
pour ce livre, et la réponse qu’il m’avait faite. Huit ans après, elle laisse
songeur :
« D’autres que toi ont choisi depuis
longtemps d’aller vivre sous des cieux fiscaux plus cléments. L’idée d’aller
t’installer en Suisse ou dans tout autre paradis fiscal ne t’a jamais traversé
l’esprit ? »
Gérard Depardieu :
« Je vais être franc avec toi : oui, j’ai déjà pensé m’exiler en Suisse. Non
pas seulement pour payer moins d’impôts, mais pour gagner une certaine
tranquillité. Pour fuir une pression médiatique qui a déjà causé beaucoup de
tort à ma famille et à ma vie privée. Et, aussi, pour rejoindre un certain
nombre de mes amis qui ont depuis longtemps élu domicile là-bas. Il y a un an et demi, j’ai demandé au fisc
helvétique de calculer ma facture fiscale. Le forfait qu’il me réclamait était très élevé. J’y ai
tout de même réfléchi à deux fois. Et puis, je me suis dit que c’était trop compliqué. Je me suis dit surtout que j’étais français
et donc que je devais payer mes impôts en France. Au fond, je suis très bien ici.
Mieux, sans doute, que partout ailleurs. J’aimerais simplement que l’on sache
que lorsque je touche un gros cachet pour un film, je paie des impôts, des
charges sociales, des cotisations chômage… Les sommes énormes qui sont annoncées
dans la presse ne vont pas directement dans ma poche.
Une fois qu’on a dit cela, je sais que je suis un privilégié,
que je gagne beaucoup d’argent, mais je n’en ai absolument pas
honte ».
À l’époque en 2004, et
toujours à l’occasion de ce livre d’entretien, Gérard Depardieu avouait payer
2,3 millions d’euros d’impôts par an et être évidemment soumis à l’impôt de
solidarité sur la fortune (ISF). Il ajoutait :
« J’ai toujours su instinctivement qu’une
partie de l’argent que je gagnais appartenait à l’État et devait être
redistribué. Je suis pour le partage et la redistribution de
richesses ».
Au moment où il choisit de
s’exiler en Belgique, ces propos sonnent comme un drôle de paradoxe.
C’est stupéfait, non, plus précisément atterré, que j’ai lu votre lettre
ouverte publiée hier dans les
colonnes du Journal du Dimanche. Je vous le dis avec franchise : vous
auriez mieux fait de vous abstenir tant vos propos, votre réflexion, vos
arguments sont... lamentables. J’écris lamentable, et non pas minable.
Une précision d’ailleurs : Jean-Marc Ayrault ne vous a pas qualifié de « minable » — c’eut été inexact, une grossière erreur psychologique. En effet, vous êtes tout (gargantuesque, en perdition, etc.), tout sauf… minable. Vous prenez pourtant ce prétexte pour monter sur vos grands chevaux dans le JDD. Ayrault a cru utile de préciser que votre attitude, votre exil fiscal, votre fuite en Belgique, à…1 kilomètre (!) de la frontière française s’apparentaient à une attitude minable. Cette fois, le premier ministre a raison. Il a trouvé le juste mot, le bon qualificatif, l’expression idoine.
Que les lecteurs de Marianne.net soient rassurés : je ne me permettrai pas de critiquer votre lettre dans le détail.
Une précision d’ailleurs : Jean-Marc Ayrault ne vous a pas qualifié de « minable » — c’eut été inexact, une grossière erreur psychologique. En effet, vous êtes tout (gargantuesque, en perdition, etc.), tout sauf… minable. Vous prenez pourtant ce prétexte pour monter sur vos grands chevaux dans le JDD. Ayrault a cru utile de préciser que votre attitude, votre exil fiscal, votre fuite en Belgique, à…1 kilomètre (!) de la frontière française s’apparentaient à une attitude minable. Cette fois, le premier ministre a raison. Il a trouvé le juste mot, le bon qualificatif, l’expression idoine.
Que les lecteurs de Marianne.net soient rassurés : je ne me permettrai pas de critiquer votre lettre dans le détail.
Un journaliste face à un monstre sacré de la société française,
l’affrontement serait par trop inégal. Je ne résisterai pas, pas un instant, à
un monstre sacré de votre espèce. On ne s’attaquait pas à Gabin ; on ne s’en
prend pas davantage à Depardieu. Force, puissance et magie du cinéma. Et nous
vous avons tant aimé au cinéma avant que, curieusement, vous ne vous
spécialisiez dans les navets en série. Mais ceci est une autre histoire qui a
sans doute à voir avec votre appétit... financier. Autorisez-moi tout de même
quelques remarques, non pas de journaliste, mais de citoyen, puisque c’est le
citoyen Depardieu qui s’exprime dans le JDD. Et il déconne sacrément, le
citoyen Depardieu !
Vous vouliez y exprimer la colère d’un homme blessé par l’injustice de son sort ; vous vous y montrez en réalité sous un jour bien différent : hâbleur, grandiloquent et creux. Vous consentez par exemple à « continuer à aimer les Français et ce public avec lequel j’ai partagé, dites-vous, tant d’émotions ».
Nous vous saurions gré de ne pas nous jeter (trop vite) dans les poubelles de l’Histoire, nous qui sommes à l’origine de votre gloire et fortune. Mais vous avez la mémoire sacrément courte : vous devez tout, absolument à ce pays, à sa langue, à ses créateurs (metteurs en scène, scénaristes, directeurs photo, etc.) et aux Français qui ont acheté — pour vous voir, c’est incontestable — des millions de tickets de cinéma et des millions de DVD. Votre carrière, et vous le savez mieux que personne, n’est pas et n’a jamais été internationale. Elle est franco-française et, sorti de nos frontières, vous n’avez jamais réussi à percer dans les autres grands pays de cinéma. C’est ainsi et c’est incontestable. Gabin, auquel vous vous referez si fréquemment, a réussi à Hollywood ; ce n’est pas votre cas. Delon était adulé en Italie notamment. Vous ne pouvez pas en dire autant. Bref, cette seule raison – votre carrière franco-française – devrait suffire à disqualifier, ne serait-ce qu’an plan moral, votre exil fiscal. Mais de cela, vous ne nous entretenez pas dans votre libelle du JDD.
Vous préférez revenir sur les raisons de la bouleversante disparition de votre fils Guillaume, accablant la justice de la République. Il aurait mieux valu que vous vous absteniez.
Vous choisissez de vanter les charmes de l’alcoolisme motorisé. La encore, nous aurions préféré que vous ne profériez pas pareille énormité.
Vous nous apprenez que vous ne demandez pas à la sécurité sociale de vous rembourser vos dépenses médicales. Nous nous en tapons éperdument.
Et puis, entre deux divagations, vous finissez par lâcher le morceau : vous fuyez parce que vous payez trop d’impôts. Voilà une bonne raison. Mais ne nous prenez pas pour des benêts en la noyant dans un prêchi-prêcha historico idéologique qui n’impressionne personne : « je vous rends mon passeport (...). Nous n’avons plus la même patrie, je suis un vrai Européen, un citoyen du monde »… Et bla-bla-bla... Une affaire de fric, rien que ça. Une affaire triste, voilà tout.
Vous vouliez y exprimer la colère d’un homme blessé par l’injustice de son sort ; vous vous y montrez en réalité sous un jour bien différent : hâbleur, grandiloquent et creux. Vous consentez par exemple à « continuer à aimer les Français et ce public avec lequel j’ai partagé, dites-vous, tant d’émotions ».
Nous vous saurions gré de ne pas nous jeter (trop vite) dans les poubelles de l’Histoire, nous qui sommes à l’origine de votre gloire et fortune. Mais vous avez la mémoire sacrément courte : vous devez tout, absolument à ce pays, à sa langue, à ses créateurs (metteurs en scène, scénaristes, directeurs photo, etc.) et aux Français qui ont acheté — pour vous voir, c’est incontestable — des millions de tickets de cinéma et des millions de DVD. Votre carrière, et vous le savez mieux que personne, n’est pas et n’a jamais été internationale. Elle est franco-française et, sorti de nos frontières, vous n’avez jamais réussi à percer dans les autres grands pays de cinéma. C’est ainsi et c’est incontestable. Gabin, auquel vous vous referez si fréquemment, a réussi à Hollywood ; ce n’est pas votre cas. Delon était adulé en Italie notamment. Vous ne pouvez pas en dire autant. Bref, cette seule raison – votre carrière franco-française – devrait suffire à disqualifier, ne serait-ce qu’an plan moral, votre exil fiscal. Mais de cela, vous ne nous entretenez pas dans votre libelle du JDD.
Vous préférez revenir sur les raisons de la bouleversante disparition de votre fils Guillaume, accablant la justice de la République. Il aurait mieux valu que vous vous absteniez.
Vous choisissez de vanter les charmes de l’alcoolisme motorisé. La encore, nous aurions préféré que vous ne profériez pas pareille énormité.
Vous nous apprenez que vous ne demandez pas à la sécurité sociale de vous rembourser vos dépenses médicales. Nous nous en tapons éperdument.
Et puis, entre deux divagations, vous finissez par lâcher le morceau : vous fuyez parce que vous payez trop d’impôts. Voilà une bonne raison. Mais ne nous prenez pas pour des benêts en la noyant dans un prêchi-prêcha historico idéologique qui n’impressionne personne : « je vous rends mon passeport (...). Nous n’avons plus la même patrie, je suis un vrai Européen, un citoyen du monde »… Et bla-bla-bla... Une affaire de fric, rien que ça. Une affaire triste, voilà tout.
Maurice Szafran - Marianne
Exilés fiscaux : les stars qui s'en vont, celles qui
restent
« Il a été décidé qu’on reparlerait, dès les petites classes, d’éducation civique,
d’honnêteté, de courage, de refus du racisme et d’amour de la République.
Il est dommage que l’école ne soit fréquentée que par les enfants. »
André Frossard
Dany Boon, Jo-Wilfried Tsonga, Patrick Bruel ,
Jamel Debbouze, Christian Clavier,
et maintenant Gérard Depardieu : la fuite des cerveaux s’accélère en France,
pour irriguer l’Europe qui n’en demandait pas tant.
Le Nouvel Observateur
Après
l'annonce de l'installation de Gérard
Depardieu en Belgique, plongée dans le monde de nos riches vedettes,
effrayées par la taxe à 75% sur les hauts revenus promise par François
Hollande. Qui part, qui reste ?
(Article
publié dans "le Nouvel Observateur" du 12 juillet 2012)
Ils
portent haut les couleurs de la France. Leurs succès sont drapés de tricolore et
font résonner "la Marseillaise" d'un bout à l'autre de la planète. Ils vendent
des millions de disques ou de livres, se font acclamer par des foules en liesse.
Ils amassent des fortunes et sont la fierté de notre pays. Et pourtant, ils lui
manquent. Car ils ont décidé de payer leurs impôts ailleurs, loin de cette
patrie qui leur a donné une chance de faire éclore leur talent. A quelques
exceptions près, ils ne font rien d'illégal. Pour la plupart, ce ne sont même
pas des fraudeurs, tout juste des fuyards.
Hallyday, Houellebecq, Tsonga, Pagny…
Johnny Hallyday, Michel
Houellebecq, Jo-Wilfried Tsonga et bien
d'autres ne sont pas des délinquants. Ils ont même des circonstances
atténuantes. On peut comprendre qu'une vedette qui a réussi matériellement
rechigne à reverser une énorme partie de ses revenus à l'Etat. On peut compatir
au triste sort de ces ultrariches qui se disent ainsi spoliés. De Michel
Polnareff à Françoise Hardy, en passant par Florent Pagny ou notre ex-Marianne,
Laetitia Casta, elle est longue, l'histoire de ces conflits opposant quelques
fortunés au fisc.
C'est
en 1914, lors du déclenchement de la guerre, et à l'instigation de Joseph
Caillaux, que l'impôt sur le revenu, proportionnel aux gains de chacun, a vu le
jour en France. La date est symbolique de l'effort de solidarité nationale ainsi
demandé à ceux qui
étaient en mesure d'y répondre. Aujourd'hui, alors que tant de sacrifices sont
réclamés aux Français, comment tolérer ces étoiles filantes qui s'en vont
prospérer dans des contrées plus accueillantes ? La rigueur pour tous et l'exil
pour quelques-uns ?
"Patriotisme fiscal"
Nicolas Sarkozy
lui-même, ce président qui avait commencé son mandat en choyant les puissants,
avait fini par s'en émouvoir pendant la campagne présidentielle. En 2007, il
avait allégé massivement l'ISF pour faire revenir en France nos riches
expatriés. La "jurisprudence Johnny" ne s'est pas concrétisée et, cinq
ans plus tard, Sarkozy a fini par envisager la création d'une taxe sur les
revenus des exilés fiscaux.
Ce
"patriotisme fiscal", ce fut justement l'un des refrains du candidat François
Hollande, sans doute l'une des clés de son succès. La droite s'était arrogé
depuis quinze ans le totem de la défense de la patrie à force de renchérir sur
les questions d'immigration et d'insécurité. Le socialiste a réussi à ramener ce
combat à sa place d'origine, celle du moins que lui avait donnée la Révolution
française. Il a restauré le patriotisme de gauche en brandissant l'impôt comme
un nouvel oriflamme républicain indispensable au "redressement dans la
justice".
Le 3
juillet, son Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, a lancé devant l'Assemblée :
"Le patriotisme, ce n'est pas fuir la France pour les paradis
fiscaux et laisser à ceux qui restent le poids de l'effort !" Le
chef du gouvernement a même pris les accents de Danton à la tribune de la
Convention, à la veille de la bataille de Valmy, pour en appeler à la
"mobilisation générale" face à la crise. Nos stars exilées accepteront-elles
encore longtemps de passer pour des déserteurs ?
Chanteurs, acteurs : salut les artistes !
Pas
facile d'être un acteur engagé ou un chanteur rebelle et de critiquer l'impôt.
Pourtant, le show-biz est en ébullition depuis l'annonce des réformes fiscales
de François Hollande. Quelques voix ont même dénoncé une forme de racket à
venir. Parmi les indignés, Françoise Hardy, convaincue qu' "avec un
revenu hypothétique de 150.000 euros par an" elle ne pourra pas payer ses 40.000
euros d'ISF sur son appartement de l'avenue Foch, à Paris, estimé à
plus de 2 millions d'euros. "J'ai mis vingt-cinq ans à finir de le payer",
s'offusque-t-elle. Alors, elle a décidé de vendre. "Je suis révoltée, ça me
mine, je vais sans doute devoir le céder au tiers de sa valeur."
Patrick Bruel, lui, ne digère
pas la taxe à 75% que le chef de l'Etat veut instaurer pour ceux qui gagnent
plus d'un million d'euros par an : "C'est limite confiscatoire et spoliateur."
Concerné, lui qui cumule ses droits de compositeur-interprète, ses cachets
d'acteur et ses gains dans les tournois de poker, Bruel n'envisage pas pour
autant de fuir la France. Il répète qu'il continuera d'y payer ses impôts.
D'autres s'éclipsent en toute discrétion.
Officiellement, jamais à cause du fisc mais pour profiter du grand
air suisse, du calme bruxellois ou de l'anonymat du London way of life. Ainsi,
Dany Boon (7,5 millions d'euros de revenus en 2011) assure s'être installé à Los
Angeles "pour travailler au calme". Il ne supporte pas de passer pour un
déserteur : "Je ne suis pas parti aux Etats-Unis pour fuir les impôts !" Daniel
Auteuil, lui, s'était installé outre- Quiévrain, comme José Garcia. Moins
ensoleillée que Monaco, la Belgique a, elle aussi, de
beaux atours fiscaux : pas d'impôts sur les plus-values ni d'ISF, et ce à moins
de deux heures de Paris. Mais Daniel Auteuil l'assure, étant resté résident
français, il a "toujours payé ses impôts exclusivement en France".
D'autres n'ont pas eu les mêmes scrupules, notamment les Robinson
suisses : Alain Delon, Isabelle Adjani, Johnny Hallyday, Patricia Kaas ou
Charles Aznavour y séjournent ou y ont séjourné. Exilé à Crans-Montana, ce
dernier y profite de l'avantageux "forfait fiscal" helvétique qui allège de
façon spectaculaire la facture des riches résidents non suisses. Ceux-ci
bénéficient d'impôts très faibles dès lors qu'ils parviennent à démontrer qu'ils
vivent la moitié de l'année dans la Confédération.
Johnny, lui, n'a jamais caché son aversion pour l'administration des
impôts. Fervent supporter de Sarkozy en 2007, il avait annoncé qu'il
reviendrait en France après l'adoption du bouclier fiscal. On l'attend toujours.
Le rocker ne verse des impôts à l'Etat français que sur un quart de ses revenus
(ceux perçus en France), estimés au total à plus de 5 millions d'euros en 2011
par capital (contrats publicitaires et dividendes inclus). Et s'acquitte d'un
forfait fiscal de 720.000 euros par an dans son pays d'accueil. "On
s'emmerde grave à Gstaad", avait ironisé son ami Michel Sardou. Peut-être, mais
à moindres frais.
D'autres au contraire sont fiers d'enrichir les caisses
hexagonales... y compris avec l'argent récolté hors de nos frontières. Tel David
Guetta, qui déclarait il y a quelques mois qu'il trouvait "normal" de payer ses
impôts en France même si 95% de ses revenus (3,2 millions estimés pour 2011)
proviennent de l'étranger. Le DJ va-t-il changer d'avis ? Certains s'inquiètent
de le voir bientôt s'installer à Londres.
Car,
depuis la victoire de la gauche, les rumeurs les plus folles circulent sur la
fuite éventuelle de nos VIP Christian Clavier est aperçu chez un conseiller
fiscal ? Voilà qu'on l'imagine aussitôt sur le départ... (En octobre, il a
déclaré s'être installé
à Londres jusqu'à fin 2013, NDLR). Et même des soutiens people du
"président normal" s'étranglent de rage contre sa taxe à 75%, que Jamel Debbouze
juge "ridicule". Certains d'entre eux finiront-ils par décamper ? Comme dirait
Florent Pagny, porte-voix de la lutte contre le fisc, c'est leur liberté d'y
penser...
"Je ne me regarderais pas bien dans la glace"
Interrogé hier sur BFM TV, Michel Sardou a fustigé la décision de l'acteur qui campait récemment Obélix. "Les gens brûlent leurs idoles facilement. Mais je dois dire que là c'est très maladroit en ce moment. Je ne juge pas Gérard. Je m'en fous. Mais il va aller s'emmerder comme un rat là-bas. Il y a une justice divine quand même. Il va se faire chier comme un rat", a balancé le chanteur de "La Maladie d'amour".Refusant de juger l'acteur, le chanteur a expliqué que jamais il ne pourrait quitter la France :
"Chacun a sa morale. Chacun a son attitude. Mais pour moi, la fuite n'a jamais été une stratégie. Jamais. Nous avons un gouvernement qui nous demande de faire un effort pour deux ans. Tout ce que je fais, c'est ici que je le fais. C'est à ce pays que le je dois. Alors si je me mettais à leur dire 'désolé les mecs, vous êtes dans la merde, excusez moi, mais je prends l'oseille et je me tire', je ne me regarderais pas bien dans la glace. Deux ans d'effort, franchement, on ne va pas en mourir".
Michel Sardou déclare ne pas "être choqué" par la nouvelle
tranche d'impôt à 75 % pour les très hauts revenus si celle-ci demeure
"provisoire", et affirme qu'il ne fuira pas à l'étranger. Dans un
langage parfois cru, il a, par ailleurs, également ajouté qu'il "n'aimerait pas
être à la place" de François Hollande, et fustigé la mondialisation.
"Aujourd'hui, tu dépends d'un connard qui est à l'autre bout du monde, qui fait
faillite et d'un seul coup 5.000 mecs en Provence sont au chômedu ! je n'aime
pas cette mondialisation et le président ne peut pas y faire grand-chose",
estime-t-il.
La Suisse, l'autre pays des sportifs
En
Suisse, on trouve des banques sûres, des montres de haute précision, du chocolat
de grande qualité... et des tennismen français. Beaucoup. Arnaud Clément s'est
installé à Genève, Richard Gasquet et Gilles Simon ont choisi Neuchâtel, Gaël
Monfils a posé ses valises à Nyon. A un jet de caillou du lac Léman vivent
également Marion Bartoli, Amélie Mauresmo, Julien Benneteau ou encore Guy
Forget. Sans oublier le meilleur tennisman français, Jo-Wilfried Tsonga, qui a
pourtant cru bon de se fendre fin juin d'une petite leçon de morale à l'endroit
de l'équipe de France de foot à l'occasion de l'Euro 2012 : "C'est dommage pour
la suite, pour les jeunes qui vont venir et qui vont avoir cet exemple-là et qui
va empirer."
Si le
tennis fait figure de cas d'école en matière d'exil fiscal, Yannick Noah ayant
ouvert la voie au début des années 1990, c'est parce que les prix octroyés aux
vainqueurs sont devenus faramineux (1,2 million d'euros pour le lauréat de
Roland Garros !), que les carrières au plus haut niveau ne durent pas plus d'une
dizaine d'années, et que l'élite est restreinte. "Un joueur qui est 140e ou 150e
au classement mondial et qui voyage tout au long de l'année perd de l'argent
lorsqu'il joue sur le circuit", a assuré Guy Forget aux sénateurs qui l'auditionnaient le 19 juin, dans le cadre de la commission d'enquête sur l'évasion des
capitaux.
Accueillante, la Suisse héberge beaucoup d'autres sportifs, tel le
multichampion du monde de rallye, Sébastien Loeb. Pour se justifier, tous
évoquent leur souci, tout à fait légal, d'"optimiser" des gains amassés sur une
courte période. Mais aucun ne fait jamais mention de la formation et des moyens
reçus de structures fédérales, donc publiques et financées par l'impôt, qui leur
ont permis de faire éclore leur talent, raquette à la main ou ballon au pied...
Et voilà qu'un nouveau spectre plane sur la Ligue 1 de foot : la fameuse taxe à
75% ! Zidane l'a récemment trouvée légitime... mais il vit en
Espagne.
Le
manager du PSG, Leonardo, a, lui, une excuse toute trouvée pour ses actionnaires
qataris au cas où il ne parviendrait pas à faire débarquer au Parc des Princes
cet été les stars internationales promises. Javier Pastore (350.000 euros
mensuels !) l'a déjà qualifié de "folie" tandis que Carlo Ancelotti (6 millions
d'euros annuels...) a pris une tête d'enterrement pour soupirer qu'il s'y
plierait. Cette taxe va-t-elle provoquer un exode de stars ? L'argument serait
audible... si celles-ci n'étaient pas déjà parties.
Un
seul des dix sportifs français les mieux payés en 2011 exerce encore dans
l'Hexagone : Yoann Gourcuff (6,8 millions d'euros). Tous les autres, de Franck
Ribéry (11,4 millions) à Patrice Evra (6 millions) en passant par Tony Parker
(11,2 millions) ou Karim Benzema (11 millions)... ne reviennent plus en France
que quatre ou cinq fois par an, le temps d'honorer une sélection et d'entonner à
pleins poumons : "Allons enfants de la patrie."
Ecrivains, l'exil au bout de la plume
"C'est parfaitement normal. Plus on gagne d'argent, plus on paie
d'impôts." Début mars, Emmanuel Carrère, l'auteur de "Limonov", prix Renaudot et
best-seller de l'année 2011, a remis les pendules à l'heure. Non, il n'a pas
l'intention de quitter la France pour des cieux fiscaux plus cléments. Quelques
jours auparavant, Nicolas Sarkozy l'avait cité comme un candidat potentiel à
l'exil. L'ex-président prophétisait que la "démagogie insensée" des projets
fiscaux de Hollande ferait fuir beaucoup d'auteurs, "pas simplement les chefs
d'entreprise. Ce peut être un cinéaste, un acteur, un écrivain"...
Le
problème, c'est que beaucoup n'ont pas attendu le débarquement socialiste pour
passer la frontière. Depuis trois ans déjà, Marc Levy (1,5 million de
livres écoulés l'an passé), le deuxième écrivain le mieux payé de France,
derrière Guillaume Musso, s'est installé à New York, aux Etats-Unis, "un
pays où la fiscalité est beaucoup plus lourde qu'en France",
a-t-il récemment précisé au "Parisien". Michel Houellebecq, prix Goncourt 2010
pour "la Carte et le Territoire", a opté, depuis le début du siècle, pour
l'Irlande (une contrée réputée pour son hospitalité fiscale en matière de droits
d'auteur) avec des allers-retours fréquents en Espagne.
Citons encore Christian Jacq, le chasseur de momies égyptiennes
("Ramsès", "les Mystères d'Osiris"), retiré en Suisse, du côté de Vevey ;
Corinne Maier, qui a filé en Belgique après son premier best-seller ("Bonjour
paresse") et en a tiré le thème d'un nouvel essai ("Tchao la France"), ou
Eric-Emmanuel Schmitt, le
romancier-nouvelliste-réalisateur-essayiste-dramaturge-etc. L'auteur de "Quand
je pense que Beethoven est mort alors que tant de crétins vivent..." se préserve
des appétits du fisc français dans une tranquille maison bruxelloise. Il a même
obtenu la nationalité de sa nouvelle patrie. La Belgique ?, avait-il indiqué au
"Soir" : "Un pays chaleureux. Malgré son climat."
L’argent,
l’argent roi, l’argent Dieu,
au-dessus du sang, au-dessus des larmes,
adoré plus haut
que les vains scrupules humains,
dans l’infini de sa puissance ! »
Zola
Torreton écrit à Depardieu :
"Tu
quittes ton pays au moment où l'on a besoin de toutes les forces"
Après la presse et les politiques, les artistes donnent eux aussi leur opinion sur le départ de Gérard Depardieu en Belgique
pour payer moins d'impôts.
Parmi eux, le comédien Philippe Torreton qui lui écrit une lettre publiée dans le quotidien Libération.
"Alors
Gérard, t'as les boules ?"
Tu ne veux plus être français…?
Tu quittes le navire France en pleine tempête
?
Tu vends tes biens et tu pars avec ton magot
dans un pays voisin aux cieux plus cléments pour les riches comme toi ?
Evidemment,
on cogne sur toi plus aisément que sur Bernard Arnault ou les héritiers
Peugeot… C’est normal, tu es un comédien, et un comédien même riche comme toi
pèse moins lourd ! Avec toi, on peut rattraper le silence gêné dont on a fait
preuve pour les autres… C’est la nature de cette gauche un peu emmerdée d’être
de gauche.
Mais Gérard, tu pensais qu’on
allait approuver ? Tu t’attendais à quoi ? Une médaille ? Un césar d’honneur
remis par Bercy ? Tu pensais que des pétitions de soutien de Français au RSA
allaient fleurir un peu partout sur la Toile ? Que des associations caritatives
allaient décrocher leur abbé Pierre, leur Coluche encadrés pour mettre ta
tronche sous le plexi ? Le Premier ministre juge ton comportement minable, mais
toi, tu le juges comment ? Héroïque ? Civique ? Citoyen ? Altruiste ? Dis-nous,
on aimerait savoir…
Le Gérard «national», le
rebelle de Châteauroux, le celui qui, s’il n’avait pas rencontré le cinéma,
serait en taule à l’heure qu’il est comme tu le disais, le poète de l’écran la
rose à la main quand ça devait faire bien d’en avoir une, qui nous sort un
«c’est celui qui le dit qui y est»… Tu prends la mouche pour un petit mot et tu
en appelles au respect, comme le fayot dans la cour de récré… Tu en
appelles à tes gentils potes de droite pour que le grand méchant de gauche
arrête de t’embêter… Tu voudrais avoir l’exil fiscal peinard, qu’on te laisse
avoir le beurre et l’argent du beurre et le cul de la crémière qui tient le
cinéma français… Tu voudrais qu’on te laisse t’empiffrer tranquille avec ton
pinard, tes poulets, tes conserves, tes cars-loges, tes cantines, tes restos,
tes bars, etc.
Et nous faire croire en tournant
avec Delépine qu’un cœur social vibre encore derrière les excès et les
turpitudes de l’homme… Nous faire avaler à coups de «han» de porteur d’eau que
tu sèmes dans tes répliques trop longues, que l’homme poète, l’homme blessé,
l’artiste est encore là en dépit des apparences… Le problème, Gérard, c’est que
tes sorties de route vont toujours dans le même fossé : celui du «je pense qu’à
ma gueule», celui du fric, des copains dictateurs, du pet foireux et de la
miction aérienne, celui des saillies ultralibérales…
Tout le monde ne peut pas avoir
l’auréole d’un Rimbaud qui, malgré ses trafics d’armes, fut et restera un
poète… à jamais. Toi, tu resteras comme un type qui a fait une belle opération
financière sur le cinéma français, un coup de Bourse, une OPA… Tu as transformé
tes interprétations les plus réussies en stratégie de défiscalisation. Il doit
y en avoir un florilège de répliques que tu as jouées et qui résonnent
bizarrement maintenant !
Des répliques de poète, d’homme
au grand cœur, d’yeux grands ouverts sur la misère du monde, orphelines de
pensée et violées par leur interprète, parce que l’homme a les rognons
couverts, mais l’acteur a fait faillite… L’homme est devenu riche mais sa fortune
lui a pété à la gueule. Tu sais, ces gros pets foireux dont tu te vantes
et que tu lâches sur les tournages en répondant à tes 12 téléphones au
lieu de bosser ?
Tu votes pour qui tu veux, et tu fais ce que tu veux d’ailleurs,
mais ferme-la, prends ton oseille et tire-toi, ne demande pas le respect, pas
toi ! Sors de scène, Montfleury, «ce silène si ventru que son
doigt n’atteint pas son nombril !» Et
puisqu’on est dans Cyrano, te rappelles-tu de cette réplique, mon collègue,
qu’il adressait à De Guiche sauvant sa peau au combat en
s’étant débarrassé de son écharpe blanche ? Il demande à Cyrano ce qu’il
pense de sa ruse et ce dernier lui répond… «On n’abdique pas l’honneur
d’être une cible.»Tu t’en
souviens ? Tu devrais… En ce temps-là, tu apprenais ton texte…
On va se démerder sans toi pour
faire de ce pays un territoire où l’on peut encore, malgré la crise, se soigner
correctement, où l’on peut accéder à la culture quelle que soit sa fortune, où
l’on peut faire des films et monter des spectacles grâce à des subventions
obtenues en prélevant l’impôt…
Un pays que tu quittes au moment
où l’on a besoin de toutes les forces, en plein siège d’Arras, sous les yeux
des cadets médusés… Adieu.
« Cyrano
de Bergerac » Edmond Rostand
(Article publié dans "le
Nouvel Observateur" du 12 juillet 2012)