mercredi 7 mars 2018

"Il est urgent d’agir [contre la pollution de l’air]. Ne rien faire, c’est se rendre coupable de non-assistance à personnes en danger."


"Il est urgent d’agir [contre la pollution de l’air]. Ne rien faire, c’est se rendre coupable de non-assistance à personnes en danger."
Des spécialistes reconnus des maladies respiratoires défendent le projet de piétonnisation des voies sur berges.



La parole est aux pneumologues. Alors que la polémique est à son comble à propos de la piétonisation des voies sur berges rive droite, cinq professeurs de médecine publient une tribune pour défendre le projet conspué de la maire de Paris, Anne Hidalgo (PS). Les signataires sont des spécialistes reconnus des maladies respiratoires, chefs de différents services de pneumologie – hôpital de Créteil (94), de la Pitié-Salpêtrière (13e) – ou d’allergologie pédiatrique – Trousseau (12e) –, vice-doyen de faculté de médecine Pierre-et-Marie-Curie… Leur message est clair.
Voici leur tribune ci-dessous :
Oui à des voies sur berge piétonnes de la Seine rive droite à Paris, une mesure utile à la préservation de la santé de tous
En France, la pollution de l’air extérieur entraine environ 48 000 décès prématurés chaque année. A Paris, elle entraine environ 2500 décès chaque année et retire plus de 2 ans d’espérance de vie à 30 ans. À l’échelle de la Métropole, ce sont 6600 décès qui seraient évitables chaque année.
Il est urgent d'agir. Ne pas le faire, c'est se rendre coupable de non-assistance à personne en danger. Or nous savons que, dans la capitale, le trafic routier est la cause principale de la pollution de l'air extérieur, produisant deux tiers des émissions de dioxyde d'azote et 55% des émissions de particules.
Réduire le trafic routier dans les grandes villes françaises et en particulier dans Paris est désormais une priorité de santé publique. Toutes les initiatives permettant de réduire les émissions de dioxyde d’azote et de particules amélioreront la santé de nos concitoyens.
C’est pourquoi nous appelons les élus locaux et nationaux à prendre sans attendre des mesures pour réduire la mortalité liée à la pollution. Les solutions sont multiples et connues : diminuer les vitesses de circulation autorisées, transformer des portions d’autoroutes en boulevards urbains, interdire progressivement les véhicules les plus polluants, développer les transports en commun, le recours aux véhicules électriques et les circulations douces.
La fermeture à la circulation des voies sur berge de la Seine rive droite à Paris fait ainsi partie des mesures utiles à la préservation de la santé de tous. Elle diminuera le trafic automobile au cœur de Paris, engendrant une diminution très significative de la concentration en polluants sur le secteur concerné. Le projet a en effet pour objectif, au regard de la baisse globale de trafic attendue sur l’ensemble quais hauts/quais bas de la rive droite, de réduire les émissions de polluants de 38 % en moyenne et ce pour tous les polluants sur le secteur du projet. Cet objectif est associé à une diminution des concentrations de polluants dans l’air (NO2, particules fines, benzène…) supérieure à 23%, et proche de 30% pour certains, dans cette zone.
L’étude AIRPARIF de juillet 2013 montre que les aménagements réalisés entre 2002 et 2012 aboutissent à une diminution générale du trafic et de la circulation avec un impact significatif en matière de qualité de l’air, du fait d’une réduction des émissions de polluants atmosphériques d’environ 10 % (-11% pour les oxydes d’azote et -9% pour les particules fines).
Les résultats de ces études scientifiques démontrent l'impact positif attendu de voies sur berges piétonnes pour diminuer la pollution de l’air dans Paris. Or la commission d’enquête vient de rendre un avis consultatif défavorable concernant ce projet.
Nous, professionnels de santé, appelons à ne plus reculer pour améliorer la qualité de vie et la santé des Parisiens. Des décisions courageuses doivent être prises pour tout simplement sauver des vies.  Rendre piétonnes les voies sur berge de la Seine rive droite en est une.
Professeur Bruno HOUSSET, pneumologue, chef du service de pneumologie au centre hospitalier intercommunal de Créteil et président de la Fondation du souffle. ;
Professeur Jocelyne JUST, pneumopédiatre, cheffe du service d’allergologie pédiatrique, hôpital Armand-Trousseau, Présidente de la Société française d'allergologie ;
Professeur Thomas SIMILOWSKI, pneumologue, chef du service de pneumologie et réanimation médicale, groupe hospitalier Pitié-Salpêtrière-Charles-Foix, président du Fonds de recherche en santé respiratoire ;
Docteur Gilles DIXSAUT, médecin hospitalier, Assistance Publique-Hôpitaux de Paris, président du Comité de Paris contre les maladies respiratoires ;
Professeur Alexandre DUGUET, pneumologue, vice-doyen de la faculté de médecine Pierre et Marie Curie Paris 6.


 Les architectes Delphine Baldé, Julien Beller, Michel Cantal-Dupart, Silvia Casi, Manuelle Gautrand, François Leclerc, Jean Nouvel, Christian de Portzamparc et Elizabeth de Portzamparc, Pierre-Alain Trévelo, qui soutiennent l'action menée par la Maire de Paris Anne Hidalgo.
« En piétonnisant les voies sur berges, Paris fait un acte innovant et courageux pour la bonne santé de tous les Franciliens. La décision du Conseil Municipal de Paris et de sa Maire est en cela raisonnable et exemplaire. 


Cet acte libère en cœur d'agglomération une Seine ouverte pour tous, riverains, visiteurs et touristes. Car notre métropole du Grand Paris doit retrouver son fleuve, à l'instar d'autres villes. Elle montre un exemple de reconquête de l'eau et de son fleuve. 



Les berges de Seine ne s'arrêtent pas au quai d'Ivry à l'Est et au quai Saint-Exupéry à l'Ouest. Mais le dysfonctionnement du Grand Paris impose à chaque entité voulant moderniser sa ville de se comporter de façon plus ou moins égoïste suivant sa posture géographique. 



Il faut également traiter toutes les pénétrantes occupant les berges. Ce doit être une action coordonnée qui cherche à valoriser la Seine, fleuron de notre Grande Capitale qui se rappelle à nous par des débordements qui se moquent des limites administratives.



Et si les jugements peuvent être partiaux voire déficients par manque d'appréciation, c'est justement la raison pour laquelle il existe une procédure d'appel qui confirme, corrige ou infirme un avis quel qu'il soit.



En ce qui nous concerne, nous soutenons l'action des Parisiens et de leurs représentants élus pour l'image courageuse qu'ils donnent avec cette mesure à bien d'autres métropoles qu'elles soient nationales ou internationales. »

lundi 5 mars 2018

Italie : les pays de l'UE peuvent pleurer, c'est leur œuvre


Les gouvernements européens ont de quoi s'alarmer après la poussée des populistes lors des élections italiennes. Mais qu'ont-ils fait pour les éviter ?


Après le Brexit, après la victoire de Trump aux Etats-Unis, après la progression de l’extrême droite dans de nombreux pays européens, après les gouvernements "illibéraux" en Pologne et en Hongrie, les résultats des élections italiennes ne manquent pas de soulever une vaste inquiétude dans les autres démocraties.
Les nationalistes de la Ligue (ex-Ligue du Nord, devenu une sorte de FN local), dirigée par de Matteo Salvini, dépassent 18% des voix, contre 4% en 2013. Ils s'offrent le luxe de passer devant leurs alliés de Forza Italia de Berlusconi (14%). Le mouvement "dégagiste" et eurosceptique 5 Etoiles est désormais le premier parti italien : son score atteint près de 32%...
Quant aux progressistes proeuropéens du Parti démocrate, ils tombent sous les 20%, ce qui, du fait du nouveau mode de scrutin, leur donnera peu de candidats au Parlement. Comme dans bien d’autres pays, à commencer par la France, la gauche est en miettes.
Il y a de quoi s’alarmer : l’Italie est non seulement l’un des pays fondateurs de l’Union européenne (et la troisième économie de l’Europe continentale), c’est aussi le pays du fascisme.
ce résultat était prévisible. Pire : les partenaires de l’Italie au sein de l’UE l’ont quasiment programmé, en laissant la péninsule se débrouiller, seule, face à une puissante vague migratoire venue d’Afrique, via la Libye. Plus de 600.000 personnes ont traversé la méditerranée depuis cinq ans, dans un pays incapable d’absorber un tel accroissement de la population, pour des raisons économiques et budgétaires.
Rien n’a été fait pour répartir l’accueil de ces migrants, au contraire : on a appliqué avec zèle le "règlement de Dublin", qui veut que tout migrant doit demander l'asile dans le premier pays de l'Union européenne dans lequel il est arrivé. Rien n’a été fait non plus pour aider les Italiens à fournir un accueil décent à ces migrants. Ajoutez à cela l'austérité permanente, imposée au nom de la discipline européenne depuis la crise de 2008, avec pour résultat un chômage des jeunes de 34%, des faillites en cascades, une explosion de la pauvreté : comment être surpris des résultats du 4 mars ?

Bien des voix avaient mis en garde l’UE et ses membres face au risque d’un tel scénario-cauchemar, faute d’une plus grande solidarité. Ils sont pourtant restés sourds, malgré les nombreux appels à l’aide de Rome. Le piège s'est refermé dimanche. L'Europe jura, mais un peu tard, etc.