Fawzia Zouari, née au Kef, est une écrivaine et
journaliste tunisienne.
Docteur
en littérature française et comparée de la Sorbonne, Zouari vit à Paris
depuis 1979. Elle travaille durant dix ans à l’Institut du monde arabe –
à différents postes dont celui de rédactrice du magazine Qantara1 – avant
de devenir journaliste à l’hebdomadaire Jeune Afrique en 19961.
Fawzia
Zouari, fille de Carthage & des Lumières. Elle a donc trahi le
tombeau des Ancêtres, en sortant du village familial et en tirant sa
Tunisie éternelle vers le métissage: dans’J'ai épousé un Français’ elle
raconte le tremblement identitaire vécu dans son couple: elle, Maghrébine
attachée à la laïcité, lui Français, converti à l’Islam, limite’barbu’.
Mais c’est dans l’humour et l’érudition que cette journaliste à Jeune
Afrique trouve l’équilibre.
« Il y a des jours où je regrette d’être
née arabe. »
Les jours où je me réveille devant le
spectacle de gueules hirsutes prêtes à massacrer au nom d’Allah, et, où je m’endors avec le bruit des
explosions diffusées sur fond de
versets coraniques.
Les jours où je regarde les cadavres
joncher les rues de Bagdad ou de Beyrouth par la faute des kamikazes; où
des cheikhs manchots et aveugles s’arrogent le droit d’émettre des fatwas
parce qu’ils sont pleins comme des outres de haine et de sang; où je vois
des petites filles, les unes courir protéger de leur corps leur mère
qu’on lapide, et les autres revêtir la robe de mariée à l’âge de 9 ans.
Et puis ces jours où j’entends des
mamans chrétiennes confier en sanglotant que leur progéniture convertie à
l’islam refuse de les toucher sous prétexte qu’elles sont impures.
Quand j’entends pleurer ce père musulman
parce qu’il ne sait pas pourquoi son garçon est allé se faire tuer en
Syrie. À l’heure où celui-ci parade dans les faubourgs d’Alep, kalachnikov
en bandoulière, en attendant de se
repaître d’une gamine venue
de la banlieue de Tunis ou de Londres, à qui l’on a fait croire que le
viol est un laissez-passer pour le paradis.
Ces jours où je vois les Bill Gates
dépenser leur argent pour les petits Africains et les François Pinault
pour les artistes de leur continent, tandis que les cheikhs du Golfe dilapident
leur fortune dans les casinos et les maisons de charme et qu’il ne vient
pas à l’idée des nababs du Maghreb de penser au chômeur qui crève la
faim, au poète qui vit en clandestin, à l’artiste qui n’a pas de quoi
s’acheter un pinceau.
Et tous ces croyants qui se prennent
pour les inventeurs de la poudre alors qu’ils ne savent pas nouer une
cravate, et je ne parle pas de leur incapacité à fabriquer une tablette
ou une voiture.
Les
mêmes qui dénombrent les miracles de la science dans le Coran et sont
dénués du plus petit savoir capable de faire reculer les maladies.
Non ! L’Occident, ces prêcheurs pleins
d’arrogance le vomissent, bien qu’ils ne puissent se passer de ses
portables, de ses médicaments, de ses progrès en tous genres.
Et la cacophonie de ces « révolutions » qui
tombent entre des mains obscurantistes
comme le fruit de l’arbre.
Ces islamistes qui parlent de démocratie
et n’en croient pas un mot, qui clament le respect des femmes et les
traitent en esclaves.
Et ces gourdes qui se voilent et se
courbent au lieu de flairer le piège, qui revendiquent le statut de
coépouse, de complémentaire, de moins que rien !
Et ces « niqabées » qui, en Europe,
prennent un malin plaisir à choquer le bon Gaulois ou le bon Belge comme
si c’était une prouesse de sortir en
scaphandrier ! Comme si
c’était une manière de grandir l’islam que de le présenter dans ses
atours les plus rétrogrades.
Ces jours, enfin, où je cherche le salut
et ne le trouve nulle part, même pas auprès d’une élite intellectuelle
arabe qui sévit sur les antennes et ignore le terrain, qui vitupère le
jour et finit dans les bars la nuit, qui parle principes, se vend pour
une poignée de dollars, qui fait du bruit et qui ne sert à rien !
Voilà, c’était mon quart d’heure de
colère contre les miens. Ouf !
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