Bien souvent je me suis trouvé en total désaccord avec les
idées de Alain Finkielkraut en
particulier sur sa défense sanscritique de la politique menée par l'état d'Israel,.
Il est
demeuré aveugle
devant la souffrance, des enfants, des femmes, des hommes de Palestine, malgré
la vie dans le ghetto de Gaza, malgré la vie depuis plus de
cinquante
ans de la population dans des camps, malgré les
bombardements de Gaza ou la poursuite de la colonisation de la Cisjordanie qui
rendent impossible toute
création d'un état viable pour les Palestiniens.
Aujourd'hui
"Libération " publie dans une tribune le discours que devrait tenir
notre Président
devant les Français.
Ce discours est exactement celui
que j'aimerais entendre dans la bouche de François Hollande
«Mes chers
compatriotes,
«Vous m’avez donné mandat, en
mai 2012, de mener une politique de redressement économique et de justice
sociale. Je m’y suis efforcé dans un contexte très difficile. Peut-être ai-je
trop longtemps tâtonné. Peut-être vous ai-je déconcerté par des
annonces prématurées et des mesures contradictoires. Je souhaiterais m’expliquer
aujourd’hui devant vous mais, bien que je sois seulement à mi-mandat, je
constate que je n’ai plus le temps. Le temps m’a échappé, le temps s’est
emballé, et vous êtes maintenant sur les gradins du Colisée, vous baissez le
pouce et vous criez : "A mort !" Oh, bien sûr, vous n’êtes pas des citoyens
romains avachis et cruels. Vous avez le cœur tendre, et ce que vous me
reprochez, si j’ai bien compris, c’est d’avoir un cœur de pierre. Vous ne voulez
pas la mort du gladiateur mais celle de l’empereur. Et qui vous a persuadé que
j’étais Caligula ? Mon ex-compagne, Valérie Trierweiler. Je vous ai vus, à la
télévision, vous ruer dans toutes les librairies, les Relay H aussi bien que
la Hune à Paris, ou Mollat à Bordeaux, ou le Furet du Nord à Lille, pour acheter
cette "bombe littéraire" : Merci pour
ce moment. Et j’ai lu sur Mediapart (le site d’informations qui donne envie de
changer de planète) que Valérie Trierweiler défendait la cause des femmes
outragées, humiliées, martyrisées, et que seuls des "hétéro-machistes" attardés
pouvaient trouver à redire à ce grand déballage. Ces indiscrétions et ces
éventuelles calomnies accélèrent la marche vers l’égalité des hommes et des
femmes. Elles sont donc de gauche.
Eh bien non, mes chers compatriotes : mon
ex-compagne n’a pas accompli un acte révolutionnaire. Elle s’est vengée de moi
comme elle a voulu se venger de la mère de mes enfants, coupable d’exister
encore alors qu’elle l’avait supplantée. Et si vous n’avez rien de mieux à faire
qu’à chercher à comprendre ses motivations, ne lisez pas Simone de Beauvoir,
regardez plutôt le film Liaison fatale,
avec Glenn Close. Le machisme est, certes, loin d’avoir disparu, mais c’est voir
la réalité humaine avec les œillères de l’idéologie que de lui conférer le
monopole de la malfaisance. Ce livre est un crime contre l’individu que je suis
et contre la République que je représente. Et je crains qu’il ne porte le coup
de grâce à ce qui restait des Temps modernes dans notre postmodernité
triomphante qui, comme l’annonçait Péguy (un auteur que mes camarades
socialistes seraient bien inspirés de lire) "ne se demande pas encore anxieusement si
c’est grave, mais qui, inquiète, vide, se demande déjà si c’est bien
amusant". La contribution majeure des
Temps modernes à la civilisation tient en un mot : séparation. Séparation de
l’Eglise et de l’Etat, mais séparation aussi de la vie publique et de la vie
privée. Or, ce mur protecteur pour l’une comme pour l’autre, ce n’est pas l’Etat
qui, aujourd’hui, le démolit, ce n’est pas, en dépit de tout ce que vous
racontent les lanceurs d’alerte, Big Brother : c’est vous, chers little big brothers etlittle big sisters, vous qui succombez à
l’attrait du voyeurisme avec d’autant moins de réticence que vous êtes toujours
plus nombreux à vous exhiber sur la Toile. "Pour vivre heureux, vivons cachés",
disait l’adage. "Pour vivre heureux, déshabillons-nous devant tout le monde",
dit la société de la téléréalité et de Facebook.
Il est vrai que vous en apprenez de belles sur mon
compte. Non seulement, je maltraite les femmes mais je hais les pauvres. Ils me
dégoûtent. Je les appelle même les "sans-dents" en pouffant de rire à ma bonne
petite blague. Vous croyez vraiment à ça ? Et êtes-vous restés adolescents au
point de considérer que la classe politique se divise entre ceux qui aiment
les pauvres et ceux qui veulent les empêcher d’aller chez le dentiste par tous
les moyens ? Et comment prouver son amour des pauvres sinon en prenant la pose ?
La pose du nouveau pape faisant monter les petits enfants dans sa papamobile. La
pose de l’homme politique qui va dans les "quartiers" pour montrer qu’il est
solidaire de ses habitants et qu’il souffre avec eux. L’amour en politique,
c’est l’image de l’amour, et l’image ne doit pas tenir lieu d’action. Certes,
celui qui exerce le pouvoir se doit à son prochain comme tout un chacun, mais il
a affaire à la pluralité humaine, et donc la question ne cesse de se poser :
qui, dans ce cas précis, est mon prochain ? Il ne vit pas dans un monde
d’effusions, mais dans un monde de problèmes et de dilemmes, parfois tragiques,
parfois inextricables. Est-ce tendre la main aux jeunes gens issus de milieux
modestes que de supprimer les bourses au mérite à l’université et de les
remplacer par des bourses sur critères exclusivement sociaux ou est-ce au
contraire les pousser malignement à se prévaloir de leur origine et à demander
réparation au lieu de faire l’effort nécessaire pour accéder à la culture et à
un avenir meilleur ? La justice, qui est l’objet par l’excellence de la
politique, requiert le discernement. Je m’interroge tous les jours pour savoir
si le discernement me guide ou s’il me fait défaut. Mais visiblement vous vous
en fichez. Les problèmes, ce n’est pas votre problème. Vous voulez de l’amour.
Le monde, disait Chesterton, est plein d’idées chrétiennes devenues folles, et
cette folie est en train de tuer la politique. J’aurais gardé un peu d’espoir
dans cette tourmente si je n’avais vu, à gauche comme à droite, des Mélenchon et
des Apparu s’adosser au livre de Valérie Trierweiler pour continuer d’instruire
mon procès. Ils ne savent pas, les inconscients, que nous sommes, eux et moi,
dans le même bateau et que ce bateau coule.
Dans la Tache, un roman qui se déroule en pleine
affaire Clinton-Lewinsky, Philip Roth écrit qu’il rêve d’une banderole tendue
d’un bout à l’autre de la Maison Blanche, et qui proclamerait : "Ici, demeure un
être humain". Je suis un être humain : tout aux délices de l’indiscrétion et à
la volupté du sarcasme, vous n’avez pas l’air de vous en rendre compte. J’ai
donc décidé de tirer ma révérence. Malgré Mediapart, je n’irai pas sur une autre
planète. Mais je vous laisse, chers little big brothers et chères little big sisters. Amusez-vous
bien.
Vive la République ! (mais elle est morte et ce
n’est pas un nouveau numéro qui la ressuscitera). Vive la France ! (mais cette
patrie littéraire n’est plus qu’un vague souvenir). A bas les réseaux sociaux !
(mais cette hydre infernale a gagné la guerre).»
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