vendredi 21 mars 2014

Nicolas Sarkozy un homme honorable ?




Nicolas Sarkozy un homme honorable ?

Durant cinq ans, Nicolas Sarkozy, président de la République,
a détesté l'état de droit et la magistrature.
Depuis le mois de mai 2012, battu, il ne fait que continuer
 d'une autre manière.
Son pouvoir a gangrené certains magistrats hier et son entregent, aujourd'hui, en a fait dériver un vers le trouble,
pour ne pas dire plus, par l'entremise de son avocat.
Les extraits des écoutes entre Nicolas Sarkozy et son conseil règlent définitivement la question.
Si le secret professionnel sert à cela, à dissimuler des turpitudes,
que les grandes consciences du barreau cessent de
le revendiquer comme absolu ! (Mediapart).
Vous avez vraiment envie de voir revenir, à la tête de notre République,
Nicolas Sarkozy, cet homme honorable ?

Philippe Bilger  magistrat honoraire


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Depuis quelques jours, Nicolas Sarkozy a involontairement capturé notre actualité. Le feuilleton rebondit, à souhait. Ce vendredi, c'est une sorte de Lettre aux Français qu'il adresse dans les colonnes du Figaro.

 Sarkozy aurait hésité à parler.

Au passage, il ment.


« J'ai longuement hésité avant de prendre la parole (…) depuis deux ans, je me suis tenu à la décision de silence et de retrait que j'avais annoncée au soir du second tour de l'élection présidentielle de 2012 (…) Et pourtant je crois qu'il est aujourd'hui de mon devoir de rompre ce silence. Si je le fais, c'est parce que des principes sacrés de notre République sont foulés aux pieds avec une violence inédite et une absence de scrupule sans précédent. » 
Sarkozy aurait hésité à parler. Au passage, il ment. Il a rompu son silence dès le mois d'août2012, avec un improbable communiqué sur la Syrie. Puis on l'a revu ici ou là, s'exprimant d'une phrase ou d'une remarque. Il y a moins d'un mois, il tenait carrément un discours à Berlin, donnant quelques leçons d'Europe.

  
« Aujourd'hui encore, toute personne qui me téléphone doit savoir qu'elle sera écoutée. Vous lisez bien. Ce n'est pas un extrait du merveilleux film La Vie des autres sur l'Allemagne de l'Est et les activités de la Stasi. Il ne s'agit pas des agissements de tel dictateur dans le monde à l'endroit de ses opposants. Il s'agit de la France. » 
Sarkozy réécrit aussi son personnage et, du coup, la réalité. En matière de sécurité et d'espionnage, la boulimie législative et réglementaire de Nicolas Sarkozy, de l'intérieur à l'Elysée, fut inédite sous la Vème République (Lopsi I puis II).                                                                                 Et l'homme couine aujourd'hui que des juges le soumettent à la question...            

Dans sa tribune, Nicolas Sarkozy dit très peu du fond des affaires dont il est l'objet principal.
Karachi ? Les magistrats n'ont rien trouvé sur lui, Sarkozy oublie que l'étau se resserre sur Balladur dont il était le porte parole de campagne.
Sa fraude aux comptes de campagne en 2012 ? La sanction est une injustice, clame-t-il !
Le financement occulte par Kadhafi ? Aucune preuve non plus.  
Sarkozy ne parle pas aux Français, mais à ses fans. Il refait du Buisson, en caricature la France de 2014 en RDA pré-1989.  

Plutôt que de répondre sur le fond, Sarkozy attaque les juges qui instruisent l'affaire.
Sa "France des droits de l'homme" est en fait une autocratie où le monarque est au-dessus de la loi.  
Les mots sont pesés, les formules ont été travaillées. 

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« A quelques-uns l’arrogance tient lieu de grandeur ;

l’inhumanité de fermeté ; et la fourberie, d’esprit. »

de Jean de La Bruyère


L’outrance. Nicolas Sarkozy a choisi l’outrance pour se défendre. Soupçonné par la justice de trafic d’influence, l’ancien président de la République dans sa contre attaque publiée ce vendredi dans "le Figaro" ne se contente pas de se poser, comme c'est son habitude, en victime. Il se livre à une charge d’une incroyable violence contre la justice française en général et les juges en particulier, suppôts d’un régime qu’il compare aux dictatures staliniennes, soldats d’une police politique aussi criminelle à ses yeux que celle, la Stasi, qui a régné sur l’Allemagne de l’Est à partir des années 50.
Nicolas Sarkozy n’est pas un imbécile. Nul besoin de lui conseiller de relire ses livres d’histoires du lycée pour le convaincre que sa comparaison est insensée. Il sait, en écrivant ces mots, ce qu’il fait. Il ne perd pas ses nerfs. Il sort le lance-flamme à dessein pour embraser la scène politique à trois jours d'un rendez-vous électoral. Il brûle tout, les institutions régaliennes de la République, justice et police en premier chef, ses adversaires politiques, la presse, la liberté syndicale.

Il sera aussi intéressant d’observer qui, dans son propre camp, embrayera sur ce délire sarkozyste. Qui à l’UMP cautionnera cette dérive ? Copé et Morano ont embrayé sans surprise. Mais il est difficile d’imaginer un Juppé, un Fillon, lui emboîter le pas et se mouiller pour le défendre. Nicolas Sarkozy a compris que son retour sur le devant de la scène ne plaisait pas à tous ses amis. En s’adressant au noyau dur de la droite militante umpiste, et pas aux Français comme il feint de le faire, il cherche aussi à karchériser son propre camp…
Cette nouvelle toquade sarkozyste est enfin révélatrice de l’incapacité de l’ancien chef de l’Etat à se constituer une image, à se construire une identité politique cohérente,   à choisir un chemin lisible pour les Français. Un jour il se prétend rassembleur.  Le lendemain il divise. Un jour il se dit serein. Le lendemain il hystérise. Un jour il porte plainte contre son ancien conseiller Patrick Buisson, le lendemain il use des mêmes méthodes crapoteuse.  Cette instabilité fut sa faille lors de son quinquennat. Deux ans après sa défaite, trois ans avant une revanche qui l’obsède, ça l’est toujours.

Il a oublié que : 
C'est lui, Nicolas Sarkozy qui a fait adopter la rétention de sûreté en 2008

: elle interdit à certains détenus d'être libérés lorsqu'ils ont terminé leur peine. Ministre de l'intérieur, il a autorisé en 2006 les policiers a saisir, sans le contrôle d'un juge, les données de connexion des opérateurs téléphoniques.  Qui nous expliquait qu’il ne fallait pas se méfier de ses lois; Sécurité Intérieure… et de la mise en place de son fichage généralisé, que «  si l’on avait rien a cacher » on n’avait pas à s’inquiéter… Il est vrai qu’il plaidait aussi pour la dépénalisation du droit des affaires avec sa ministre de l’époque Rachida Dati…
La trique c’était pour le simple citoyen, pour le militant écologiste, pour le syndicaliste, pas pour les seigneurs du CAC 40.
La loi Perben 2, largement écrite Place Beauvau, a permis aux policiers de placer des micros ou des caméras dans les voitures ou chez les gens à leur insu, et la garde à vue a été étendue à 96 heures.
En 2008, le fichier Edvige autorisait les services de renseignements à collecter des informations sur tous les militants politiques, associatifs ou syndicaux, et sur toute personne ou groupe simplement « susceptible de porter atteinte à l'ordre public ».  
Surtout, l'ancien chef de l'Etat a donné à la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE, les services secrets), à partir de 2008, des moyens colossaux d'écoute et de surveillance d'Internet, sans autre contrôle que celui du coordinateur du renseignement, un proche du chef de l’état.


 Cette justice a deux vitesses a été dénoncée en son temps… Mais finalement nous n’en sommes plus là.
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"Je vous demande de vous mettre à sa place. Son courrier est très maladroit. Le président de la République ne doit pas oublier qu'il est ancien président de la République, et que sa colère doit être mesurée. Elle doit être à son tour à la hauteur de l'attaque qu'il reçoit. Elle ne doit pas être supérieure à l'attaque qu'elle reçoit.(...)Il faut comprendre les circonstances qui peuvent mener un homme à péter les plombs. Je trouve qu'il a été suffisamment malheureux pour dire des choses au-delà de ce qu'il aurait dû dire."
Bernard Tapie.

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Le chef de l'Etat a souligné qu'il "ne répondrait à aucune polémique parce qu’il est  Président de la République et qu’il a le devoir d'assurer le respect des principes qui fondent notre organisation judidiciaire et notre République", " après la violente sortie de Nicolas Sarkozy contre la justice dans une tribune.
"Laisser penser que notre pays, notre République puissent ne pas être fondés sur les libertés, c'est introduire un doute qui n'a pas sa place, et toute comparaison avec des dictatures est forcément insupportable", 
« Mon devoir comme tout président de la République", estime François Hollande,
-         "C’est d'assurer l'indépendance de la justice, la séparation des pouvoirs, l'exercice des droits de la défense, la présomption d'innocence, le respect des décisions de la chose jugée qui s'imposent à tous". "Le Conseil constitutionnel doit être respecté, pleinement respecté, entièrement respecté et personne ne peut suspecter, mettre en cause cette institution, sans alors mettre en cause l'ensemble des institutions".
-         " C'est de faire en sorte que les magistrats puissent faire leur travail dans notre pays, non pas comme ils le pensent individuellement, mais comme le droit leur fait obligation d'agir" et
-         " C’est aussi de veiller à ce que les avocats puissent assurer la tâche qui est la leur"

"Je le ferai ce devoir, je l'assurerai ce devoir chaque fois que la justice sera mise en cause, car vouloir atteindre ces principes-là c'est altérer la confiance que les citoyens doivent avoir à l'égard de la justice"

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Christiane Taubira rappelle "qu'au titre des principes sacrés de notre République, figurent l'égalité des citoyens devant la loi, le respect des droits de la défense, la séparation des pouvoirs et l'indépendance de la justice".
En qualité de ministre de la Justice, Christiane Taubira n'entend pas accepter cette injure à l'égard des citoyens français et des juges ainsi que cette attaque envers les institutions de la République, dit-elle.
"Les règles de procédure très précises ont été codifiées depuis des années et impulsées par la Cour européenne des Droits de l'Homme. Ces attaques d'une extrême violence contre les institutions, contre les magistrats au prétexte d'appartenance syndicale, et contre la haute institution constitutionnelle fragilisent l'Etat de droit, qui garantit l'égalité de tous devant la loi"
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Le ministre du Travail Michel Sapin  qualifie vendredi 21 mars la tribune de Nicolas Sarkozy  "C'est en quelque sorte une forme de coup d'Etat verbal qu'il y a sous la plume de Nicolas Sarkozy" car "oser dire que la police française ou que la justice française serait l'égale des pires polices politiques qu'on a pu connaître dans l'Europe de l'Est et dans l'Europe stalinienne" s'apparente à "un coup d'Etat verbal contre les institutions de la République Pour le ministre, "aujourd'hui c'est du Berlusconi à quoi nous assistons, c'est-à-dire de la grande gueule contre les institutions, ce n'est pas respectable ce n'est pas comme ça qu'on peut donner une belle image de la France".
Perquisitions, écoutes, tout "est décidé suivant des procédures légales (...), on est dans le cadre des lois. Si un justiciable veut se défendre comme il en a le droit (...), il existe des recours contre les décisions des juges donc on ne vient pas vitupérer les juges".
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Valls : "C’est infamant pour les magistrats et les policiers de notre pays"

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Les écoutes, «ce sont des démarches judiciaires dans le cadre de la loi.» Mélenchon ajoute : «cette loi qui permet ce genre d'inquisition, c'est lui (Sarkozy) qu'il l'a fait voter.»

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