Nicolas Sarkozy un homme honorable ?
Durant cinq ans, Nicolas Sarkozy, président de la République,
a détesté l'état de droit et la magistrature.
Depuis le mois de mai 2012, battu, il ne fait que continuer
d'une autre manière.
Son pouvoir a gangrené certains magistrats hier et son entregent,
aujourd'hui, en a fait dériver un vers le trouble,
pour ne pas dire plus, par l'entremise de son avocat.
Les extraits des écoutes entre Nicolas Sarkozy et son conseil règlent
définitivement la question.
Si le secret professionnel sert à cela, à dissimuler des turpitudes,
que les grandes consciences du barreau cessent de
le revendiquer comme absolu ! (Mediapart).
Vous avez vraiment envie de voir revenir, à la tête de notre République,
Nicolas Sarkozy, cet homme honorable ?
Philippe Bilger magistrat honoraire
….
Depuis quelques jours, Nicolas Sarkozy a involontairement capturé notre actualité. Le feuilleton rebondit, à souhait. Ce vendredi, c'est une sorte de Lettre aux Français qu'il adresse dans les colonnes du Figaro.
Sarkozy aurait hésité à parler.
Au passage, il ment.
« J'ai longuement hésité avant de
prendre la parole (…) depuis deux ans, je me suis tenu à la décision de silence
et de retrait que j'avais annoncée au soir du second tour de
l'élection présidentielle de 2012 (…) Et pourtant je crois qu'il est
aujourd'hui de mon devoir de rompre ce silence. Si je le fais, c'est parce que
des principes sacrés de notre République sont foulés aux pieds avec une
violence inédite et une absence de scrupule sans précédent. »
Sarkozy aurait hésité à parler. Au passage, il
ment. Il a rompu son silence dès le mois
d'août2012, avec un improbable communiqué sur la Syrie. Puis on l'a
revu ici ou là, s'exprimant d'une phrase ou d'une remarque. Il y a moins d'un mois, il
tenait carrément un discours à Berlin, donnant quelques leçons d'Europe.
« Aujourd'hui encore, toute personne qui me téléphone doit savoir qu'elle sera écoutée. Vous lisez bien. Ce n'est pas un extrait du merveilleux film La Vie des autres sur l'Allemagne de l'Est et les activités de la Stasi. Il ne s'agit pas des agissements de tel dictateur dans le monde à l'endroit de ses opposants. Il s'agit de la France. »
Sarkozy réécrit aussi son personnage et,
du coup, la réalité. En matière de sécurité et
d'espionnage, la boulimie législative et réglementaire de Nicolas Sarkozy, de
l'intérieur à l'Elysée, fut inédite sous la Vème République (Lopsi I puis II). Et l'homme couine aujourd'hui que des juges le
soumettent à la question...
Dans sa tribune, Nicolas Sarkozy
dit très peu du fond des affaires dont il est l'objet principal.
Karachi ? Les magistrats n'ont rien trouvé sur lui, Sarkozy
oublie que l'étau se resserre sur Balladur dont il était le porte parole de campagne.
Sa fraude aux comptes de campagne en 2012 ? La sanction est
une injustice, clame-t-il !
Le financement occulte par Kadhafi ? Aucune
preuve non plus.
Sarkozy ne parle pas aux Français, mais à ses fans. Il refait du Buisson, en caricature la France de 2014 en RDA pré-1989.
Plutôt que de répondre sur le fond, Sarkozy attaque les juges qui instruisent l'affaire.
Sarkozy ne parle pas aux Français, mais à ses fans. Il refait du Buisson, en caricature la France de 2014 en RDA pré-1989.
Plutôt que de répondre sur le fond, Sarkozy attaque les juges qui instruisent l'affaire.
Sa "France des
droits de l'homme" est en fait une autocratie où le monarque est au-dessus de la loi.
Les mots sont pesés, les formules ont été travaillées.
Les mots sont pesés, les formules ont été travaillées.
….
« A quelques-uns l’arrogance tient lieu de grandeur ;
l’inhumanité de fermeté ; et la fourberie, d’esprit. »
de Jean de La Bruyère
L’outrance. Nicolas Sarkozy a choisi l’outrance pour se défendre. Soupçonné par la justice de trafic
d’influence, l’ancien président de la République dans sa contre attaque publiée
ce vendredi dans "le Figaro" ne se contente pas de se poser, comme
c'est son habitude, en victime. Il se livre à une charge d’une incroyable
violence contre la justice française en général et les juges en particulier,
suppôts d’un régime qu’il compare aux dictatures staliniennes, soldats d’une police politique aussi
criminelle à ses yeux que celle, la Stasi, qui a
régné sur l’Allemagne de l’Est à partir des années 50.
Nicolas
Sarkozy n’est pas un imbécile. Nul besoin de lui conseiller de relire ses
livres d’histoires du lycée pour le convaincre que sa comparaison est insensée.
Il sait, en écrivant ces mots, ce qu’il fait. Il ne perd pas ses nerfs. Il sort
le lance-flamme à dessein pour embraser la scène politique à trois jours d'un rendez-vous électoral.
Il brûle tout, les institutions
régaliennes de la République, justice et police en premier chef, ses adversaires politiques, la presse, la
liberté syndicale.
Il sera aussi intéressant d’observer qui, dans son propre camp,
embrayera sur ce délire sarkozyste. Qui à l’UMP cautionnera cette dérive ? Copé
et Morano ont embrayé sans surprise. Mais
il est difficile d’imaginer un Juppé, un Fillon, lui emboîter le pas et se
mouiller pour le défendre. Nicolas
Sarkozy a compris que
son retour sur le devant de la scène ne plaisait
pas à tous ses amis. En s’adressant au noyau dur de la droite militante
umpiste, et pas aux Français comme il feint de le faire, il cherche aussi à
karchériser son propre camp…
Cette nouvelle toquade sarkozyste est enfin révélatrice de
l’incapacité de l’ancien chef de l’Etat à se constituer une image, à se
construire une identité politique cohérente, à choisir un chemin lisible pour les
Français. Un jour il se prétend rassembleur. Le lendemain il divise. Un
jour il se dit serein. Le lendemain il hystérise. Un jour il porte plainte contre son ancien conseiller Patrick Buisson,
le lendemain il use des mêmes méthodes crapoteuse. Cette instabilité fut sa faille lors de son quinquennat. Deux ans
après sa défaite, trois ans avant une revanche qui l’obsède, ça l’est toujours.
Il a oublié que :
Il a oublié que :
C'est lui, Nicolas
Sarkozy qui a fait adopter la rétention de sûreté en 2008
: elle interdit à certains détenus d'être libérés
lorsqu'ils ont terminé leur peine. Ministre de l'intérieur, il a autorisé en 2006 les policiers a saisir, sans le contrôle d'un juge, les données de connexion des opérateurs
téléphoniques. Qui nous expliquait qu’il ne fallait pas se méfier de
ses lois; Sécurité Intérieure…
et de la mise en place de
son fichage généralisé, que « si l’on avait rien a cacher »
on n’avait pas à s’inquiéter… Il est vrai qu’il plaidait aussi pour la dépénalisation du droit des affaires avec sa ministre de l’époque Rachida
Dati…
La trique c’était pour le simple citoyen,
pour le militant écologiste, pour le syndicaliste, pas pour les seigneurs du
CAC 40.
La
loi Perben 2, largement écrite Place Beauvau, a permis aux policiers de placer des micros ou des caméras dans les voitures ou chez les gens à leur insu, et la garde
à vue a été étendue à 96 heures.
En 2008, le fichier Edvige autorisait les services de
renseignements à collecter
des informations sur tous les militants politiques, associatifs ou syndicaux,
et sur toute personne ou groupe simplement « susceptible de porter atteinte à l'ordre public ».
Surtout, l'ancien chef de l'Etat a donné à la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE, les services secrets), à partir de
2008, des moyens colossaux d'écoute et de surveillance d'Internet,
sans autre contrôle que celui du coordinateur du renseignement, un proche du
chef de l’état.
Cette
justice a deux vitesses a été dénoncée en son temps… Mais
finalement nous n’en sommes plus là.
….
"Je
vous demande de vous mettre à sa place. Son courrier est très
maladroit. Le président de la République ne doit pas oublier qu'il est
ancien président de la République, et que sa colère doit être mesurée. Elle doit être à son tour à la
hauteur de l'attaque qu'il reçoit. Elle ne doit pas être supérieure à l'attaque
qu'elle reçoit.(...)Il faut comprendre les circonstances qui peuvent mener
un homme à péter les plombs. Je trouve qu'il a été suffisamment
malheureux pour dire des choses au-delà de ce qu'il aurait dû dire."
Bernard Tapie.
….
Le chef de l'Etat a souligné qu'il "ne répondrait à aucune polémique parce qu’il est Président de la République et qu’il a le
devoir d'assurer le respect des principes qui fondent notre organisation
judidiciaire et notre République", " après la violente sortie de
Nicolas Sarkozy contre la justice dans une tribune.
"Laisser penser que notre pays, notre République
puissent ne pas être fondés sur
les libertés, c'est introduire un doute qui
n'a pas sa place, et toute comparaison avec des dictatures est forcément
insupportable",
« Mon devoir comme tout président de la République", estime François Hollande,
-
"C’est d'assurer l'indépendance de la justice, la séparation des
pouvoirs, l'exercice des
droits de la défense, la présomption d'innocence,
le respect des décisions de la
chose jugée qui s'imposent à tous". "Le Conseil
constitutionnel doit être respecté, pleinement
respecté, entièrement respecté et personne ne peut suspecter, mettre en cause cette
institution, sans alors mettre en cause l'ensemble
des institutions".
-
" C'est de faire en sorte que
les magistrats puissent faire leur travail dans notre pays, non pas comme ils
le pensent individuellement, mais comme le droit leur fait obligation
d'agir" et
-
" C’est aussi de veiller à ce que les
avocats puissent assurer la tâche qui est la leur"
"Je le ferai ce devoir, je l'assurerai ce devoir chaque
fois que la justice sera mise en cause, car vouloir atteindre ces principes-là
c'est altérer la confiance que les citoyens doivent avoir à l'égard de la
justice"
….
Christiane Taubira rappelle "qu'au titre des principes
sacrés de notre République, figurent l'égalité des citoyens devant la loi, le
respect des droits de la défense, la séparation des pouvoirs et l'indépendance
de la justice".
En
qualité de ministre de la Justice, Christiane Taubira n'entend pas accepter
cette injure à l'égard des citoyens
français et des juges ainsi que cette attaque envers les institutions de la
République, dit-elle.
"Les règles de procédure
très précises ont été codifiées depuis des années et impulsées par la Cour
européenne des Droits de l'Homme. Ces attaques d'une extrême violence contre
les institutions, contre les magistrats au prétexte d'appartenance syndicale,
et contre la haute institution constitutionnelle fragilisent l'Etat de droit,
qui garantit l'égalité de tous devant la loi"
….
Le ministre du Travail Michel Sapin qualifie vendredi 21 mars la tribune de Nicolas Sarkozy "C'est en quelque sorte une forme de
coup d'Etat verbal qu'il y a sous la plume de Nicolas
Sarkozy" car "oser dire que la police française ou que la justice française serait l'égale des
pires polices politiques qu'on a pu connaître dans l'Europe de l'Est
et dans l'Europe stalinienne" s'apparente à "un coup d'Etat verbal contre les institutions de la République Pour le ministre, "aujourd'hui
c'est du Berlusconi à quoi nous assistons, c'est-à-dire de la grande
gueule contre les institutions, ce n'est pas respectable ce n'est pas comme
ça qu'on peut donner une belle image de la France".
Perquisitions, écoutes, tout
"est décidé suivant des procédures légales (...), on est dans le cadre des
lois. Si un justiciable veut se défendre comme il en a le droit (...), il
existe des recours contre les décisions des juges donc on ne vient pas
vitupérer les juges".
….
Valls : "C’est infamant pour les magistrats et les policiers de notre pays"
….
Les
écoutes, «ce sont des démarches judiciaires dans le cadre de la loi.» Mélenchon
ajoute : «cette loi qui permet ce genre d'inquisition, c'est lui (Sarkozy) qu'il l'a fait voter.»
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