vendredi 28 décembre 2018

La République se doit de défendre ses principes et de mettre en œuvre l’État de droit,


Le journaliste et écrivain Jean-François Bouthors condamne les violences physiques et verbales survenues en marge des rassemblements de Gilets jaunes. 
Selon lui, la souffrance et la colère ne justifient pas tout. 
La République se doit de défendre ses principes et de mettre en œuvre l’État de droit,

Qu’est-ce que le peuple?

Une partie des protestataires demandent désormais l’adoption d’un référendum d’initiative citoyenne qui permettrait de donner la parole au «peuple», c’est-à-dire de poursuivre par d’autres moyens l’action de ceux qui sont aujourd’hui dans la rue et sur les ronds-points. Mais faut-il se résoudre à donner raison à cette irresponsabilité érigée en technique insurrectionnelle et considérer que le peuple, c’est ce débordement qui balaye toute civilité et toute éthique sur son passage?
Ce serait oublier que tant le latin populus que le grec démos désignent les «citoyens». Non pas la masse, la foule, mais ceux qui doivent exercer leur responsabilité dans la cité.
( Les gilets jaunes sont un mouvement d’ampleur, mais on n’a jamais eu plus de 300 000 personnes dans la rue. La foule n’est pas le peuple et 300 000 personnes ne peuvent pas décider pour le peuple.
Que faire, en effet, si 300 000 personnes défilent pour demander l’interdiction de la chasse, et si la semaine d’après 300 000 défilent pour demander son maintien ? Quand les opposants au mariage pour tous ont défilé en masse, et durablement, le gouvernement aurait-il dû retirer sa loi ? Comment distinguer les revendications légitimes, qui doivent être prises en compte, des autres ?)
Oublier ce qu’écrivait Cicéron«Par peuple, il faut entendre, non tout un assemblage d’hommes groupés en un troupeau d’une manière quelconque, mais un groupe nombreux d’hommes associés les uns aux autres par leur adhésion à une même loi et par une certaine communauté d’intérêt.» Tout le contraire de cette irresponsabilité calculée, cynique, qui n’émeut guère l’opinion publique, si l’on en croit les sondages.
Oublier encore ce qu’expliquait le philosophe Cornelius Castoriadis, qui n’avait rien d’un partisan du système«Une société démocratique est une immense institution d’éducation et d’autoéducation permanente de ses citoyens.» Aux antipodes de la brutalité physique et verbale, comme de la xénophobie et de l’antisémitisme. La souffrance et la colère ne justifient pas tout. C’est pourquoi la République se doit de défendre ses principes et de mettre en œuvre l’État de droit.

Sommes-nous à un tournant dans la gestion du mouvement des Gilets jaunes par les autorités? Longtemps sur le recul, les autorités veulent profiter du reflux du mouvement et du fait que les partisans de sa poursuite se sont radicalisés. C’est l’occasion de reprendre la main et de faire valoir la défense de la République, après avoir cédé sur le pouvoir d’achat. Les violences qui accompagnaient les protestations des Gilets jaunes avaient été la force de leur mouvement. Mais ces violences qu’ils condamnaient tout en expliquant, avec un certain cynisme, qu’elles leur avaient permis de faire plier le Président et le gouvernement sont désormais leur talon d’Achille.
Vendredi, veille de l’acte VI, un dixième mort était à déplorer en lien avec un rassemblement sur un rond-point, tandis que plusieurs des Gilets jaunes présents ont aussitôt pris la fuite!
Samedi, à Montmartre, quelques autres reprenaient en chœur, geste à l’appui, un chant à connotations antisémites, tandis que d’autres, sur les Champs-Élysées, ont tenté de lyncher trois motards de la Police nationale.  Le même jour, l’un des leaders du mouvementEric Drouet, était interpellé. Il avait appelé le matin même sur Facebook à un rassemblement, non déclaré, à Montmartre. On apprenait ensuite qu’il serait jugé en juin pour «port d’armes prohibé de catégorie D» et pour «participation à un groupement formé en vue de violences et de dégradations».
La stratégie du mouvement a été jusqu’à présent celle de l’irresponsabilité organisée - non-déclaration de la plupart des rassemblements de protestation - et proclamée - déploration et banalisation des violences et des propos racistes ou antisémites. Elle permettait d’imputer au gouvernement ces «dérapages» et de justifier la poursuite du mouvement comme si de rien n’était, en se disant que la dégradation de la situation permettrait d’obtenir davantage.
Aux antipodes de la brutalité physique et verbale, comme de la xénophobie et de l’antisémitisme.
Jean-François Bouthors  journaliste et écrivain.

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