mardi 9 octobre 2012

Pigeons & vautours



#Geonpi: pourquoi le gouvernement ne peut que perdre.

Rédigé par Juan Sarkofrance le Mardi 9 Octobre 2012

Allez, oui, avouons, capitulons, abandonnons.

Lâchons la confidence finale que certains attendent.

Le gouvernement a perdu son combat contre les #geonpi.

Oui, oui. Vous avez bien lu.

Ces « gens-là » n'ont jamais renoncé.
Utilisant désormais les leviers financiers,
une caste confisque les fruits des efforts de tous,
 collectivisant les pertes et privatisant les bénéfices,
ils ont simplement changé d'échelle.
 Elle est désormais planétaire.
 Et ils se gavent.
Face à cela, la gauche, qui n'a rien appris en plus de cent ans.
Rien.
Ni sur le fond, ni sur les méthodes,
 encore moins sur la nécessité de la morale dans l'action.
Danielle Mitterrand



Nous avons tenté, comme d'autres, d'expliquer qu'il était inutile de caricaturer un débat lancé dans l'outrance et le raccourci par quelques activistes pour la plupart exilés fiscaux. Nous avons tenté, comme d'autres, de relater les reculs et les avancées des projets fiscaux du gouvernement.

Pourquoi tant de prudence ? Parce que l'équipe actuelle, non sans quelques heurts et couacs, a placé sa démarche sous le signe de l'apaisement et de la concertation dans l'une des périodes les plus difficiles que nous ayons à vivre depuis les Trente Glorieuses. L'ancienne administration était souvent secouée par les coups de mentons et les stigmatisations permanentes de son monarque. Dans son discours de politique générale, qui était également celui d'une méthode, Jean-Marc Ayrault en juin dernier avait réclamé cette place au débat. On peut aisément convenir que la période s'y prête mal, que les gens sont à bout, que la crise est trop grave, etc, etc.

On peut comprendre que la droite s'acharne , sans trouver encore son angle d'attaque. Elle oscille encore dans la caricature d'un Hollande qui en fait trop ou pas assez; d'un Hollande qui ferait du sarkozysme sans le dire ou qui ne serait qu'un vil socialo-gauchiste adorateur du Dieu fiscal.

On acceptera bien évidemment les critiques de gauche. La fiscalité du capital n'a que trop été épargnée depuis plus d'une décennie sans qu'on comprenne à quoi cela nous a donc servi. Une crise financière, déclenchée par un incroyable surendettement privé et bancaire, un outil monétaire sorti de la gouvernance politique à l'aube des années 1990, il ne faut pas être grand clerc pour comprendre que la catastrophe actuelle est aussi née des mains mêmes de ceux qui nous donnent des leçons de bonne gestion aujourd'hui. Le trop faible rabot annoncé des niches fiscales semble tout autant inexplicable.

L'attaque des #geonpi était si caricaturale qu'on pouvait donc espérer un rapide débat serein. Tout pouvait être sur la table si l'on s'épargnait l'outrance dans l'argumentation. On peut même penser que le gouvernement lui-même n'attendait rien de mieux qu'une critique constructive pour mieux répondre à l'assaut des plus manoeuvriers des #Geonpi.

Hélas, il n'en fut rien, ou si peu. Certains ont préféré persévérer dans l'anathème définitif. La messe était dite dès l'origine. Point de débat, l'échange devait rester binaire. Hollande et ses ministres étaient et resteront des sociaux-traîtres.

Le débat politique est-il vicié par 5 ans de sarkozysme et d'antisarkozysme primaires ? Ou par la Grande Crise qui précipite les réactions et accélère les coups de gueules ?

Quatre jours après l'annonce d'un retour au prélèvement forfaitaire de 19% des plus-values de cession d'actions, Libération titrait: « Taxation des plus-values : le gouvernement en arrière toute»Mais était-il seulement allé autant en avant ? Le journal n'apportait pas davantage d'éclairage que la reprise, délayée pour en faire un billet, d'un autre article de l'un de ses confrères, Les Echos. Ce dernier s'avançait au conditionnel mais on peut espérer qu'il s'approvisionne aux bonnes sources. 
« Ce ne sont plus seulement les créateurs d'entreprise, mais tous les actionnaires, créateurs, investisseurs ou dirigeants, qui vont rester soumis au régime actuel du prélèvement forfaitaire libératoire de 19 %. La condition ? Qu'ils soient détenteurs d'une part « significative » du capital. Celle-ci avoisinera sans doute les 10 à 15 % (en tout cas moins de 25 %), et sera couplée à une durée de détention allant de deux à cinq ans. La notion de créateur d'entreprise, difficile à définir, n'est donc pas retenue comme un critère. C'est le seuil et la durée de détention qui sont privilégiés. »
A gauche, donc, ce sera la curée.

Un autre débat aurait pu avoir lieu, celui qui aurait consisté à distinguer, à force d'exemples et de simulations, ceux des entrepreneurs dont le risque économique s'accompagne d'une précarité réelle. Le débat aurait pu aussi s'articuler sur les fameux Business Angels, puisque cet assouplissement, s'il se confirme, les vise directement. Les Pigeons ont largement mis en avant quelques millionnaires particuliers. Et le reste du dispositif fiscal projeté dans la PLF 2013 durcit d'autres éléments de leur capacité d'investissement.

Par exemple, les redevables de l'ISF auront davantage de mal à réduire leur impôt, nous rapporte Le Monde ce lundi 8 octobre. La journaliste Nathalie Cheysson-Kaplan détaille ainsi qu'il ne sera plus possible de « déduire de son actif taxable à l'ISF les dettes contractées pour acheter des biens qui n'entrent pas dans l'assiette de l'ISF ».  De même, l'intégration des revenus de l'assurance vie et autres placements d'épargne ne pourra être évacuée chaque année.

Mais ce débat n'aura pas lieu.

Pourquoi aurait-il lieu ?

Dormez tranquille
.


Certains fondateurs de start-up, cependant, tiquent devant cet embrasement. Guillaume-Oliver Doré, co-fondateur de Backbone Capital, se désolidarise en jugeant dans un entretien au Point  que« les pigeons détruisent l'image de l'entrepreneuriat ». Henri Verdier, co-fondateur de MFG R&D et président du pôle compétitivité CapDigital, explique ainsi dans son blog qu’il ne veut pas rejoindre les pigeons, car, même s’il déplore certaines mesures prévues par le gouvernement, quelque chose le gêne : « Au cours de la journée de vendredi, un mouvement d'apparence spontanée a enflammé la toile, autour du slogan “nous ne sommes pas des pigeons”. Je dis “d'apparence spontanée” car, à bien y regarder, il émane d'une poignée de communicants proches de l'UMP (je ne suis pas un adepte de l'outing, donc je vous laisse vous renseigner par vous-même). »
Depuis, des noms proches de l’UMP ont émergé, comme celui de Carlos Diaz, Arnaud Dassier, ou Edouard Fillias. L’ancienne ministre Nathalie Kosciusko-Morizet, dont le frère Pierre est le co-fondateur de Price Minister, a rapidement relayé le message, comme d’autres membres de l’opposition. Pour ne pas se laisser distancer par un mouvement qui l’avait complètement dépassée, la présidente du MEDEF, Laurence Parisot, surenchérit en dénonçant « le racisme anti-entreprise » du gouvernement.
« Je ne doute pas qu’à l’origine le mouvement ait été spontané. Que par la suite, il y ait eu des tentatives d’instrumentalisation de la part de la droite, il suffit de voir certains noms pour se poser des questions »,  remarque Benoît Thieulin, fondateur de l'agence Internet, La Netscouade. « Si la protestation a pris une telle ampleur, c’est qu’elle s’appuie sur un vrai malaise qui s’est installé bien avant ce gouvernement. Les entreprises du numérique ont le sentiment d’être mal aimées, incomprises de l’administration. Tout est inadapté pour elles. Même les procédures d’aide sont lourdes et opaques. Le problème est que ce malaise se soit focalisé sur la question fiscale, car le sujet est beaucoup plus vaste »
« On aurait aimé que, lorsqu’on parle d’entreprises innovantes, de création d’entreprises, tout se ne se concentre pas sur la fiscalité personnelle de l’entrepreneur »,


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